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compose une machine, et laissez-les osciller indéfiniment « entra les monstruosités et la mort, » c’est-à-dire entre des formes inutiles et le chaos, elles oscilleront ainsi pendant l’éternité sans jamais se fixer à aucune forme précise, et sans même produire l’apparence d’une machine.

M. Robin passe ensuite à l’explication du phénomène de l’appropriation des organes, et il l’explique par les faits suivans la subdivision et individualisation des élémens anatomiques, engendrés les uns par les autres, et leur configuration, d’où dérive la situation qu’ils prennent les uns à côté des autres, — révolution à laquelle ils sont assujettis, nul organe n’étant d’abord ce qu’il sera plus tard, et l’apparition successive des cellules, tissus, organes appareils et systèmes, — la consubstantialité primordiale de toutes les propriétés vitales, qui, étant immanentes à toute matière organisée, se retrouvent dans toutes les métamorphoses de cette matière, — la rénovation moléculaire par voie de nutrition et l’action du milieu interne ou externe, d’où résulte fatalement une accommodation avec ce double milieu, — enfin la contiguïté et continuité des tissus vivans, d’où naît le consensus merveilleux que l’on remarque dans l’organisation animale. Telles sont les principales causes qui expliquent, suivant M. Robin, l’appropriation des organes aux fonctions, causes du reste que nous avons recueillies çà et là dans son écrit, car il invoque tantôt l’une, tantôt l’autre, sans les coordonner d’une manière régulière et systématique.

Toutes ces causes peuvent se ramener à deux principales : d’une part l’individualisation ou spécification des élémens anatomiques avec distribution forcément déterminée par leur structure, — ce qui explique la diversité des organes et par là la diversité des fonctions, — d’autre part la contiguïté des tissus vivans, d’où naît le consensus ou l’harmonie de l’organisme en général. Les autres causes sont là pour faire nombre ; celles-ci, inutiles, n’expliquent rien ; celles-là ne sont que le fait même à expliquer. En effet, la rénovation moléculaire ou nutrition ne sert, qu’à la conservation des organes, mais n’en explique pas la formation et l’appropriation ; de même l’action du milieu, interne ou externe, ne sert qu’à limiter et circonscrire les possibilités organiques, et ne rend nullement compte des combinaisons déterminées. Quant à l’évolution des organes, qui ne sont jamais d’abord ce qu’ils seront plus tard, quant à l’apparition successive des élémens, des tissus, des organes, des appareils et des-systèmes, c’est là précisément le fait à expliquer. Nous savons bien que l’organisme, en se développant, va du simple au composé. Comment ce composé, au lieu de devenir on chaos, se distribua en systèmes réguliers, coordonnés et appropriés, c’est