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naturelle qu’on détermine avec le plus d’évidence le mal dont souffre, l’enseignement supérieur ; on reconnaît qu’il est non pas neutralisé, mais étrangement amoindri par sa pauvreté excessive. Là où il faudrait de vastes salles, de grandes galeries, des laboratoires spacieux, nous trouvons des chambrettes sans jour et radicalement insuffisantes. Sauf le grand amphithéâtre, tout est à reconstruire à l’École de médecine ; la place est tellement mesurée, qu’on passe des thèses et qu’on fait des cours dans le cabinet du doyen. Entrons à la bibliothèque : elle est fort riche et possède plus de 40,000 volumes ; mais elle ne les renferme pas, car on ne saurait où les y mettre. Dans des chambres voisines de la salle de lecture, qui est trop basse et où l’on n’y voit goutte, on a mis des casiers les uns près des autres, laissant à peine entre eux un espace suffisant pour livrer passage au bibliothécaire. Il me semblait revoir les magasins du mont-de-piété : les volumes ont été fourrés partout où l’on a pu les caser ; il y en a derrière les portes, il y en a devant les fenêtres. Ce n’est pas tout, on a été obligé de faire cinq dépôts extérieurs : chez le conservateur, dans des greniers, dans un ancien bûcher. Où placera-t-on la partie de la très intéressante bibliothèque du docteur Daremberg qui doit revenir à l’école ? On se le demande avec inquiétude, car nulle réponse raisonnable n’a encore été formulée.

La chimie joue un rôle considérable dans la thérapeutique actuelle, elle est indispensable aux médecins, et notre École de médecine, qui a eu si grande réputation dans le monde savant il y a une quarantaine d’années, devrait être à cet égard organisée de main de maître ; c’était le vœu de tous les intéressés, des élèves, des professeurs, des ministres. Pas de place, pas d’argent ! Au petit laboratoire où Orfila a distillé tant de poisons, on a annexé une grande chambre où brûlent les fourneaux à gaz, où les cornues sont suspendues aux murailles, où les baguettes de verre brillent sur les tables. Cela est suffisant pour faire des expérimentations à huis-clos, mais ce n’est point ainsi qu’il faut procéder dans l’enseignement. Préparer une expérience dans le laboratoire et l’apporter aux élèves comme preuve d’une démonstration théorique, c’est pour ainsi dire faire un tour de passe-passe ; les étudians doivent suivre toutes les phases de l’expérience, et, s’ils peuvent y mettre la main, cela ne vaudra que mieux, car on accordera que la manipulation chimique est, dans bien des cas, d’une importance exceptionnelle. Le laboratoire d’une école de médecine sérieuse doit se composer de trois parties parfaitement distinctes, quoique concourant au même but : un laboratoire pour les commençans, dans lequel le professeur expérimente en leur présence, — un laboratoire