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petites républiques de la Grèce antique, dans les conflits moins fameux, mais plus acharnés encore, dont furent témoins, pendant douze ou quinze siècles, le bas-empire et le moyen âge, les Cyclades ont joué un rôle dont il ne faudrait pas mesurer l’importance à leur étendue. Tout cet archipel réuni ne présente pas plus de 7,000 kilomètres carrés de superficie habités par 134,000 âmes. Infiniment plus peuplé autrefois il est vrai, cet archipel a fourni des marins aux flottes de tous les âges. Il se compose de trois chaînes à peu près parallèles, allant du cap Sunium et de la pointe méridionale de l’Eubée rejoindre les îles de Milo, d’Anaphi et de Santorin. Zea, Thermia, Serpho, Siphante, l’Argentière, Milo, composent avec quelques rochers insignifians le premier groupe. Jura, Syra, Paros, Anti-Paros, Io, Sikino, Polycandro, forment le second ; Andros, Tine, Miconi, Naxos, Amorgos, Anaphi, constituent le troisième. Les Sapiences, Cerigo, Cervi, Spezzia, Hydra, Poros, Egine, Salamine, Macronisi, sont des îles contiguës au continent et distinctes de l’archipel des Cyclades, mais, comme ces dernières, plus dignes d’être mentionnées pour la célébrité qui s’attache à leur nom que pour la place qu’elles occupent dans le monde. Il faut sortir de la mer Egée et se porter jusqu’au groupe échelonné le long des rivages de l’Asie-Mineure pour rencontrer des parcelles de territoire qui cessent d’être en quelque sorte de la poussière cosmique. Chypre a une superficie dont n’avait point eu à rougir un royaume quand les royaumes n’étaient que des fiefs relevant, comme autant de provinces vassales, des empires. Chypre comprend dans son périmètre 6,700 kilomètres carrés ; Métélin en mesure 1,700, Rhodes 1,372, Chio 780, Samos 390, Cos 267. À l’exception de Samos et de Chio, le vent de révolte qui soufflait de la Morée n’atteignit aucun point de ces lointains rivages. Plaçons-nous au centre des Cyclades, sur le sommet de Paros ou sur celui de Syra, décrivons autour de nous un cercle de 30 ou 40, de 50 lieues au plus de rayon ; nous aurons touché de la pointe de notre compas les derniers confins des parages où nous conduira ce récit, les bords extrêmes du cirque dans lequel les flottes et les armées belligérantes vont pendant des années entières se mouvoir. La Grèce continentale, la Morée, l’Eubée, la Crète, les Cyclades, Samos, unies dans une lutte mortelle contre le sultan, c’est à peine, si l’on ne considère que l’importance territoriale, la Corse, la Sardaigne et la Sicile coalisées contre la monarchie de Charles-Quint ou contre l’empire actuel d’Allemagne. Ici encore, comme au temps de l’antiquité, la scène est étroite, la terre qu’on se dispute est exiguë, la cause seule est grande, et le juste intérêt que cette cause existe suffira pour préserver de l’oubli le souvenir de combats qui eussent pu s’appeler, — avec plus de raison que les batailles livrées