Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 103.djvu/710

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nistre de l’instruction publique, à qui on prépare un succès en croyant l’abattre d’un seul coup. On a des commissions d’apparat où, sous de prétendues transactions, l’on s’épuise laborieusement à trouver le moyen d’éluder toutes les difficultés, de ne rien organiser, de faire vivre le pays dans le vide entre la république et la monarchie. Le résultat le plus clair est qu’on s’use réciproquement, et dans cette assemblée souveraine trop nombreuse, et par cela même incohérente, il ne s’est pas trouvé jusqu’ici quelques hommes pour mettre un peu d’ordre dans cette confusion, pour dire simplement : Non, il ne s’agit ni de conflits de fantaisie, ni de fusions dynastiques, ni de subtilités parlementaires ; il s’agit du territoire à délivrer d’abord, des premières conditions d’un régime libre à préserver, des habitudes d’ordre et de discipline à rétablir partout, du pays à remettre sur pied. Cette direction a manqué.

Il y a mieux, il s’est trouvé un homme à la fois chef du pouvoir exécutif et grand parlementaire, qui pouvait être le guide le plus naturel et le plus utile, qui s’est appelé lui-même le leader de l’assemblée, et celui-là on s’occupe, sinon de le renverser, du moins de l’annuler et de l’éloigner des discussions publiques. On s’étudie bien singulièrement à ébranler les dernières garanties d’action régulière qu’il y ait encore, au risque d’ajouter à la confusion et de créer une de ces conditions indéfinissables où tout peut être compromis, l’indépendance qu’on est sur le point de reconquérir, ces libertés parlementaires qu’on prétend défendre, l’honneur même d’une société civilisée qu’on veut sauver. Voilà la situation que nous osons appeler humiliante, parce qu’au fond c’est l’impuissance s’avouant presque elle-même en présence des plus impérieuses nécessités publiques, et cette situation, elle se résume tout entière aujourd’hui dans les délibérations de cette commission des trente, qui ressemble à un petit parlement à côté du grand parlement, qui depuis deux mois est occupée à trouver une formule de transaction entre M. le président de la république et le parti qui lui dispute ses prérogatives dans l’assemblée. La commission n’est pas bien sûre de trancher la question, à ce qu’il semble, puisque l’autre jour le président, M. de Larcy, s’écriait naïvement : « Oh ! il n’y a que le bon Dieu qui pourrait le faire… »

Toujours est-il qu’elle travaille depuis bientôt deux mois, cette commission des trente, créée pour régler les attributions des pouvoirs publics, pour donner au pays quelque chose qui ressemble à des institutions, à une organisation politique ! Après les sous-commissions qui ont préparé leurs projets, c’est la commission plénière qui entre en scène, qui discute, qui met en ligne des considérans, des amendemens, des sous-amendemens. Rien ne manque à cette discussion singulière et aux combinaisons sur lesquelles M. le président de la république est maintenant appelé à s’expliquer, non, rien n’y manque si ce n’est la lumière,