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des cloisons en fer, sont très petites, et la ventilation y est insuffisante. Les prisonniers se lèvent en été à cinq heures, en hiver à cinq heures et demie, et se couchent, été et hiver, à huit heures. On leur accorde trois heures pour les repas, en outre une heure en été et trois heures en hiver pour lire ou écrire dans leur cellule avant de se mettre au lit. Le dimanche est consacré aux exercices religieux, qui durent trois heures et demie, et à la promenade en rangs dans la cour de la prison. On s’est vivement préoccupé de la nourriture des condamnés. Il y a ici un double écueil à éviter : trop accorder et provoquer ainsi de regrettables comparaisons, trop réduire la ration quotidienne et compromettre ainsi la santé des prisonniers. A Chatham, à Portsmouth et à Portland, les condamnés reçoivent tous les jours 645 grammes de pain, sauf le dimanche, où la ration est de 840 grammes. Ils ont tous les jours au déjeuner environ 40 centilitres de cacao avec addition de lait et de mélasse, au souper 55 centilitres de gruau assaisonné de gingembre ou de poivre. Au dîner, on leur sert quatre fois par semaine 140 grammes de bœuf ou de mouton rôti et une livre de pommes de terre, deux fois par semaine une soupe grasse aux légumes, toujours avec une livre de pommes de terre, enfin le dimanche, jour où ils ne travaillent pas, 112 grammes de fromage. A Pentonville et à Milbank, le régime est à peu près le même, sauf que la ration de viande n’est que de 110 grammes et celle du pain de 560 grammes. On n’oserait penser qu’il y ait excès dans ce régime alimentaire en voyant la maigreur de la plupart des condamnés, et surtout en lisant les rapports des médecins. Celui de Portland n’hésite pas à dire, dans son dernier rapport, que la ration, surtout celle du soir, lui paraît insuffisante pour des hommes qui travaillent en plein air et rentrent épuisés par une journée d’efforts.

Après avoir suivi le condamné parmi les différens stages de sa captivité, nous n’avons plus qu’à voir ce qu’il devient au moment décisif où la libération provisoire lui est accordée et où il doit chercher à reprendre sa place dans la société. Si l’on songe à la destinée de l’homme qu’attendent à la sortie de la prison les séductions de sa vie passée, la tyrannie des anciens complices, la difficulté de trouver du travail, la misère et tout le cortège des tentations qu’elle mène avec elle, on se sent pris d’une profonde pitié, et l’on s’étonne que la société n’ait pas songé depuis longtemps à tendre une main secourable à la faiblesse du prisonnier libéré. L’œuvre accomplie en Irlande par sir W. Crofton, ce système où la surveillance et le patronage s’allient et se soutiennent mutuellement, devait naturellement attirer les regards de l’Angleterre. En ce dernier pays, rien ou presque rien n’avait été fait jusqu’en 1857. Quelques sociétés de patronage existaient dans les comtés. A Londres même,