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de loi sera bientôt soumis à l’assemblée ; en tout cas, les documens recueillis ne tarderont pas à être publiés.

En attendant, notre attention se tourne naturellement vers les pays étrangers. Tandis que la France semblait renoncer aux expériences, on s’est appliqué presque partout à poursuivre l’essai des systèmes les plus opposés. La Belgique, touchée des avantages de l’isolement continu des prisonniers, a décidé d’en faire la base de tout son régime pénitentiaire ; depuis quelques années, la Hollande paraît s’être engagée dans une voie analogue. D’autre part l’Angleterre, après avoir été forcée d’abolir la transportation des criminels, a combiné un système mixte et graduel où l’isolement des prisonniers n’a d’autre objet que de les préparer à des épreuves successives, se terminant d’ordinaire par une libération conditionnelle. Ce système, qui a conquis aux États-Unis et en Europe de nombreux admirateurs, a excité d’assez vives discussions au sein du congrès international pénitentiaire réuni à Londres au mois de juillet 1872. Il nous a paru intéressant de rappeler ici les expériences auxquelles l’Angleterre s’est livrée depuis un demi-siècle sur le traitement à infliger aux malfaiteurs, et de décrire rapidement l’état actuel des prisons anglaises. Cette étude, faite en dehors de tout parti-pris, d’après les documens publiés par le gouvernement anglais, sur les notes que nous avons recueillies en assistant aux séances du congrès et en visitant les divers établissemens pénitentiaires de l’Angleterre, ne sera peut-être pas inutile au moment où l’assemblée nationale est appelée à résoudre tant de questions délicates se rattachant à la punition et à l’amélioration morale des condamnés.


I

L’Angleterre n’a que deux sortes de prisons, les unes qui appartiennent aux comtés et aux bourgs (county or borough gaols), les autres qui appartiennent au gouvernement et auxquelles on réserve le nom de prisons pour les condamnés (convict prisons). À ces deux sortes de prisons répondent deux sortes de peines : l’emprisonnement, dont la durée ne peut excéder deux ans, et la servitude pénale, dont la durée la plus courte est de cinq ans. Les prisons des comtés et des bourgs sont placées sous la direction des juges de paix. Réunis dans leurs assises trimestrielles, ils se font rendre compte des détails de l’administration, approuvent les dépenses, nomment le gouverneur et les employés. Quelques-uns d’entre eux sont délégués pour visiter la prison au moins une fois par mois et y exercer leur autorité, notamment en ce qui concerne les punitions à infliger aux détenus. Le gouvernement, bien qu’il