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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 janvier 1873.

L’année qui commence, qui compte quelques jours à peine, sera-t-elle bienfaisante et propice ? sera-t-elle pour notre pays éprouvé l’année de la délivrance, des réparations nécessaires, de l’activité patiente, régulière et féconde dans la sécurité reconquise ? Verra-t-elle renaître, au lieu des contentions passionnées et stériles, les émulations généreuses de toutes les bonnes volontés animées avant tout du patriotique désir de relever la puissance et l’honneur de la France ? C’est le secret de l’avenir de demain, de cet avenir qui devient à chaque instant le passé.

Toujours est-il que cette année nouvelle a eu du moins la fortune de faire son entrée dans le monde honnêtement, modestement, sans bruit, sans agitations et sans orages. On n’a pas célébré sa naissance avec pompe dans les régions officielles comme aux temps où les cortèges défilaient aux Tuileries. Il n’y a pas eu même le plus petit discours aux réceptions de Versailles. Tout s’est passé avec simplicité, sans cérémonie, et en définitive rien n’est venu troubler ces premiers jours d’une année dont l’histoire ressemble jusqu’ici à celle des peuples heureux qui ont la bonne chance de ne pas faire parler d’eux. On dirait qu’un peu de ce souffle favorable qui est dans l’air et qui émousse les rigueurs ordinaires de la saison est passé dans les esprits. La politique est comme la température, elle s’est adoucie tout à coup après les violentes bourrasques de la fin de l’autre année. Lorsque l’assemblée se réunissait il y a deux mois, on ne parlait que de guerre, de gouvernement de combat, de crises inévitables ; on semblait marcher au milieu de toutes les passions prêtes à prendre feu. L’assemblée vient de se retrouver de nouveau à Versailles après quelques jours de vacances, elle a repris son œuvre avec le plus grand calme et de l’humeur la plus tranquille, comme si elle avait oublié pour le moment tout ce qui l’a émue et troublée il y a quelque temps.