après Sedan ? De nos armées, tout ce qui reste c’est un malheureux corps prudemment et habilement ramené par le général Vinoy, une dernière poignée de soldats qui sera le noyau solide de la défense parisienne. La France éperdue cherche de toutes parts une direction, elle ne voit que les défaites qui se succèdent et la révolution qui la menace d’une désorganisation plus complète. Paris lui-même, quoique décidé à remplir son devoir de citadelle de l’indépendance française, a beaucoup à faire encore pour se mettre en état de défense, pour achever ses armemens, ses approvisionnemens, — et treize jours à peine nous séparent de l’arrivée des Allemands devant Paris, de l’investissement absolu et définitif ! A partir de ce moment, plus rien : la France disparaît derrière les lignes prussiennes, le monde n’existe plus, Paris est réduit à lui-même dans cette redoutable claustration où tout fermente et s’agite. C’est le siège qui commence avec toutes ses épreuves, ses misères et ses impossibilités. On en parle peut-être bien à l’aise aujourd’hui. Ce gouvernement de la défense nationale, il est vrai, a été un médiocre pilote dans la tempête ; il a fait ce qu’il a pu, et ce qu’il a fait, c’est encore cette œuvre de résistance entreprise presque contre toute espérance, soutenue malgré tout pendant près de cinq mois, poursuivie au milieu de tous les dangers, des journaux qui divulguent tout, des clubs qui soufflent la défiance et la haine, des passions qui s’essaient à la guerre civile, des inquiétudes d’une population tout entière passant d’une heure à l’autre de la résignation à l’impatience irritée. On a tenu cinq mois sans recevoir un secours, voilà le fait ! C’est là le beau côté ; malheureusement ce n’est qu’un côté de cette dramatique et douloureuse histoire, et c’est ici justement que, sous ces dehors d’une défense qui reste toujours un honneur, apparaît avec une intensité croissante, redoublée, tout ce qui fait de la révolution de septembre, du siège de Paris, une préparation aussi involontaire qu’irrésistible à l’insurrection du 18 mars.
La vérité est que, si ce siège de Paris, qu’on était réduit à subir, n’était qu’une « héroïque folie » au point de vue militaire, comme on l’a dit, il était bien autrement dangereux encore au point de vue politique, puisque pour tenter, sans succès possible, ce qu’on appelait d’avance une folie héroïque, on était obligé de faire appel à toutes les forces, de développer, d’entretenir un état moral où une déception mettrait infailliblement le feu. Le 18 mars n’est point sans doute, quoi qu’on en dise, la suite nécessaire du 4 septembre, il est du moins la rançon, la cruelle rançon du siège, de la politique qu’on a suivie, des conditions qu’on a subies ou qu’on s’est créées, les unes inévitables, les autres parfaitement arbitraires et factices, celles-ci infligées en quelque sorte par la force des choses, celles-là dues à l’imprévoyance, à de faux calculs, à la légèreté ignorante et