échéance le bois dont il a besoin pour les usages journaliers de la vie.
A l’aide de ces deux lois fécondes sur le reboisement et le regazonnement des montagnes, l’administration forestière a, obtenu en peu de temps de merveilleux résultats. En dix ans, de 1860 à 1870, malgré les hésitations et les incertitudes du début, 95,000 hectares de terrains en pente furent régénérés. Le département des Hautes-Alpes, si maltraité jusqu’alors par les eaux sauvages, eut la plus belle part de ces travaux. Avec le temps, les préventions que les paysans montraient d’abord se sont évanouies. La mise en réserve des pâturages, que l’on repoussait dans le principe, même par la violence, est regardée maintenant comme le salut du pays, sauf par un petit nombre de mécontens qu’inspire trop évidemment l’intérêt personnel. Réglementer les pâturages, boiser les ravinemens, voilà la préoccupation du pays. Le conseil-général des Hautes-Alpes en proclame avec enthousiasme l’utilité. Bien loin de rencontrer encore des résistances, les ingénieurs forestiers se sentent appuyés par l’opinion ; MM. Séguinard et Costa de Bastelica, auxquels la direction de cette œuvre importante est confiée, reçoivent la sympathique expression de la reconnaissance publique. Peu à peu, dans la montagne, les hideux ravins qui rongeaient les coteaux disparaissent sous la verdure ; dans la plaine, les cônes de déjection se couvrent de belles récoltes et de plantations ; le lit des torrens est fixé ; les routes franchissent les plus mauvais passages sur des ponts que les crues n’enlèvent plus ; les ruisseaux qui descendent à la rivière sont limpides au lieu d’être chargés de cailloux et de sédimens. Si cette transformation pouvait être poussée jusqu’à ses dernières limites, la Durance n’amènerait bientôt plus à Marseille que des eaux vives et pures en place de cet épais liquide que les filtres sont impuissans à clarifier. Pourtant tous les torrens ne sont pas susceptibles d’être éteints par ces ingénieux procédés. Il en est qui prennent naissance près des cimes de la montagne, à une telle hauteur que la végétation n’y saurait prospérer. Ceux-là sont incurables ; ils continueront leurs ravages jusqu’à ce qu’ils aient entraîné tout le terrain meuble et mis à nu les roches primitives.
Il y a quelques années, surgirent, — on s’en souvient peut-être, — de longues controverses sur le rôle météorologique des forêts. Les uns soutenaient qu’elles attirent la pluie et la grêle, et d’autres qu’elles les éloignent. On discutait beaucoup sur la façon dont les arbres modifient l’évaporation et l’infiltration des eaux pluviales, sur les rapports entre les défrichemens et les inondations des grandes rivières. Ces problèmes sont encore bien obscurs, comme tout ce qui se rapporte à la science un peu vaine que l’on appelle la