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s’ils voulaient le maintien de l’équilibre, ils n’avaient qu’à ne pas le laisser détruire à ses dépens.

Telles sont les extrémités où nous pousserait la rupture de l’alliance anglaise et que nous devons envisage hardiment, sans avoir le parti-pris d’y recourir. Aussi voudrions-nous dire à l’Angleterre : « Assez de lâches complaisances ! Nous avons tous les deux commis de grandes fautes : travaillons ensemble à les effacer. Redevenez l’Angleterre d’autrefois, la glorieuse et sage Angleterre que nous avons connue, qui nous a combattus au commencement du siècle, dont nous sommes depuis quarante ans les alliés, — la protectrice des nations faibles, l’arbitre des grands états de l’Europe, la civilisatrice des deux mondes, l’implacable adversaire de l’esprit de conquête, le défenseur inflexible du droit des peuples et de la liberté européenne. Nous sommes affaiblis tous les deux, vous dans votre politique et dans votre prestige, nous dans notre territoire, dans nos finances, dans nos armes, dans notre puissance tout entière ; mais avec de la sagesse et de la persévérance, surtout par l’intime union de nos forces, nous pouvons regagner ce que nous avons perdu. Nous pouvons tout au moins préserver l’équilibre européen d’une nouvelle atteinte. Nos intérêts sont les mêmes que par le passé ; notre alliance n’est pas moins utile à la civilisation et à la paix du monde. Nous mettrons un frein aux appétits des nations conquérantes. Nous protégerons l’indépendance des états neutres, de ces nationalités faibles et menacées, condamnées sans nous à être dévorées par leurs voisins, et qui, sous notre loyale garantie, serviront à cimenter la paix européenne. »

L’Angleterre entendra-t-elle ce langage ? Nous voudrions ne pas en douter. Malheureusement elle ne fait rien qui puisse fortifier cet espoir. Sauf quelques charités presque humiliantes, l’Angleterre ne nous a pas donné depuis la guerre beaucoup de preuves de sa bienveillance et de sa bonne foi. Elle s’est amusée des infamies de la commune ; elle se fâche quand la France reforme une armée ; elle trouve mauvais que nous regrettions nos provinces perdues ; elle ne nous permet pas même de nous défier de l’Allemagne et de nous préparer dès à présent à repousser des agressions certaines. Faut-il en croire les apparences ? L’alliance anglaise est-elle morte ?


ERNEST DUVERGIER DE HAURANNE.