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dans le présent. Comme en Angleterre après l’exposition de 1851, c’est l’enseignement populaire du dessin que l’on se préoccupa surtout d’organiser. Malheureusement Paris fut presque le seul lieu où ces tentatives se produisirent ; l’on ne citerait guère en province que Mulhouse, Lyon, Lille et deux ou trois autres villes peut-être qui se soient piquées d’émulation, et qui aient cherché à préparer aux arts industriels un personnel habile. L’état s’est jusqu’ici presque tenu à l’écart d’une propagande si nécessaire à l’industrie nationale ; ce sont les municipalités, les chambres de commerce, les sociétés industrielles ou les particuliers qui ont pris part à la rénovation de l’enseignement populaire du dessin. D’après la déposition faite dans l’enquête sur l’enseignement professionnel par M. Noyon, conseiller de préfecture et directeur des affaires municipales de la ville de Paris, il n’existait alors dans la capitale que sept écoles spéciales de dessin pour les hommes et huit pour les femmes ; toutes avaient été fondées à diverses époques par des professeurs privés et étaient subventionnées par la ville. Les écoles subventionnées de dessin pour les hommes adultes dataient les unes de 1825, les autres de 1832, de 1840. Au contraire les écoles d’adultes pour les femmes se trouvaient toutes de récente fondation, la première ayant été inaugurée en 1860. L’on en a depuis augmente le nombre de façon qu’il y en eût une pour chaque sexe dans chaque arrondissement. Quant aux écoles primaires de la ville de Paris, les enfans y apprenaient, dans la première classe le dessin linéaire et y commençaient le dessin d’ornement ; mais cela n’avait guère lieu que pour les garçons. Dans les écoles primaires de filles, on peut dire que le dessin n’était nullement enseigné ; ce n’était que dans les écoles spéciales de dessin que les femmes pouvaient être initiées à un enseignement élémentaire. Or ces écoles spéciales pour les femmes ne comptaient alors que 427 élèves inscrites, tandis que les mêmes écoles pour les hommes avaient plus de 1,600 élèves ; le chiffre de la fréquentation à ces écoles était encore plus défavorable pour les femmes. Lors d’une inspection faite à un jour déterminé, l’on avait trouvé pour les hommes 907 élèves présens et pour les femmes 202 seulement. Ainsi toutes nos écoles subventionnées de dessin se bornaient à donner de l’instruction à 200 élèves environ ; il y a pourtant à Paris plus de 105,000 ouvrières, dont 20,000 au moins sont occupées dans des industries qui se rattachent aux arts. En outre la directrice d’une de ces écoles déclarait que les résultats y étaient nuls ; l’unanimité des déposans à l’enquête reconnaissait que tout était défectueux dans cet enseignement : les locaux, les méthodes, le recrutement, surtout les modèles à la fois rares et mauvais. Une école professionnelle pour les femmes, fondée au passage Saint-Pierre et largement subventionnée par la ville,