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Diocèses conformément à sa tradition constante, elle persistait à en donner avis, au pape régnant ; nouvel anathème, nouvelle protestation de l’église excommuniée. Cela finissait par devenir un de ses offices spéciaux. Du reste aucun changement, ou plutôt l’année 1853 vit diminuer encore la position de l’épiscopat ancien-catholique.

Jusqu’alors la grande majorité des catholiques de Hollande avait dû se contenter de son organisation en église de mission. Le pape pie IX crut le moment venu de rétablir de son chef les sièges épiscopaux supprimés par ses prédécesseurs, et nomma directement un archevêque d’Utrecht, des évêques de Bois-le-Duc, de Harlem et de Ruremonde. La manière, fort injurieuse pour la nation néerlandaise, dont eut lieu cette réorganisation suscita au sein de la majorité protestante un mouvement de colère qu’on eut quelque peine à calmer. Au fond cependant il n’y avait rien de réellement changé par là dans ses rapports avec la minorité catholique ; mais la plus directement frappée fut l’église catholique épiscopale. Jusqu’en 1853, ses évêques étaient restés seuls en possession du titre officiel de leurs diocèses. Ils pouvaient encore se dire que, seuls, ils représentaient la tradition épiscopale nationale, que de meilleurs jours pourraient enfin luire où leurs ouailles naturelles les reconnaîtraient pour leurs légitimes pasteurs, que l’état anormal où se trouvait encore la masse des catholiques néerlandais était la confirmation indirecte de leur bon droit en tant que seuls continuateurs de la vieille église du pays. Désormais ils devaient voir à côté d’eux des compétiteurs qu’ils ne pouvaient regarder autrement que comme des usurpateurs, et ces compétiteurs avaient l’avantage d’être seuls reconnus par la majorité catholique, d’être en communion avec le saint-siège et avec tous les évêques de la catholicité. Leur protestation fut énergique, et touchante. Elle ne fut pas sans influence sur certaines dispositions de la loi votée par les chambres néerlandaises, qui astreignait les nouveaux évêques à des conditions de résidence peu conformes à leur titre officiel. Cette mince satisfaction ne changeait rien à tout ce que la réalité avait de décourageant, et l’opinion générale fut que le décret de Pie IX avait porté le coup de grâce à l’église des évêques nationaux en lui enlevant jusqu’à l’apparence de légitimité, qu’elle avait pu conserver jusqu’alors.


III.

Tout semblait donc fini pour les anciens-catholiques de Hollande. Leur église persistait à vivre avec sa hiérarchie, mais forcée de renoncer à toute expansion, de plus en plus enfoncée dans la masse indifférente ou hostile, condamnée à s’teindre au bout d’un temps