n’a-t-il rien écrit qui lui fût plus utile. Je n’ai pas voulu l’en prier directement, bien que je compte sur son amitié ; mais, s’il saisit cette occasion, il me fournira peut-être le moyen de lui donner des preuves de la mienne. Je vous prie de lui montrer ma lettre et de l’assurer que je désire avec passion faire quelque chose qui lui fasse plaisir. » Le cours rapide des événemens enleva l’à-propos à cette démarche, qui est du 8 juillet, et dont nous ignorons la suite. Dubois trouvait d’ailleurs à Londres même, dans l’amitié de Stanhope, des secours bien autrement efficaces que tous les vaudevilles du monde.
Le secrétaire d’état lui communiquait, sur les intrigues de l’Espagne en France, des renseignemens tirés de l’ambassadeur de Philippe V, Montéléon. L’abbé, les mains pleines de preuves, avertissait et animait le régent, lui montrait jusque dans ses antichambres et ses conseils les complices du « boute-feu Cellamare, » et l’armait d’énergie pour les résolutions extrêmes. C’est ici qu’il faut placer la vraie découverte du complot espagnol ; elle n’est point due à d’obscurs révélateurs, l’employé Buvat, à la Fillion : la lumière est venue d’Angleterre, et Dubois tenait tous les fils de la trame quand il quitta Londres au mois d’août 1718. L’écrivain de la Bibliothèque du roi, Buvat, vint lui révéler, dit-on, au commencement de décembre, les correspondances qu’il transcrivait à l’ambassade d’Espagne ; mais le copiste ignorait que depuis six mois ses rapports avec les chefs de la conspiration étaient connus et surveillés. Dans une lettre du 16 juillet 1718, Dubois en prévient l’abbé de Targny, le supérieur de Buvat, et lui recommande d’interroger avec précaution son employé. « Le prince de Cellamare, dit-il dans cette lettre, a envoyé ici un mémoire que je n’ai qu’entrevu, mais dans lequel j’ai reconnu au premier coup d’œil l’écriture de votre écrivain de la Bibliothèque du roi. Il n’est point blâmable d’avoir fait cette écriture, mais il pourrait être important de savoir qui lui a procuré la pratique de l’ambassade d’Espagne, et ensuite d’observer si on pourrait faire quelque usage de lui pour avoir des copies de ce qu’il écrit pour cet ambassadeur, ou du moins pour être averti de tout ce qu’il écrit, et en savoir le sujet et ce qu’il pourra en retenir. Si honnête garçon que soit votre écrivain, comme il s’agit du service de l’état, il ne doit pas faire scrupule de donner toutes les lumières qu’il pourra. Il manquerait tout au contraire au devoir de fidèle sujet du roi, s’il ne contribuait pas en tout ce qu’il pourra à ce qui peut être de son service. Je vous supplie, monsieur, de suivre cela avec votre sagesse ordinaire et de vouloir bien m’en instruire et d’être persuadé de ma reconnaissance. » Voilà qui diminue singulièrement le prix des révélations attribuées à Buvat, et l’on comprend maintenant pourquoi Dubois refusa de récompenser sa tardive déposition, suggérée ou commandée par l’abbé de Targny.