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pour une séance ultérieure où elle serait examinée isolément. Ainsi finit la troisième action.


IV.

Débarrassé des questions de personnes, de la plus considérable du moins, le concile pouvait se livrer tout entier aux questions de doctrine. On se souvient que, lors de la deuxième action, les magistrats avaient demandé aux évêques, de la part de l’empereur, une définition de foi sur le mystère de l’incarnation, que les évêques avaient décliné la demande, et que, sur l’observation de l’un d’entre eux qu’il fallait à une telle œuvre du temps et de la réflexion, les magistrats avaient accordé cinq jours pour la rédaction d’un projet. Les cinq jours étaient expirés et au-delà lorsque la quatrième action s’ouvrit le 17 octobre. Rien n’avait changé dans l’intervalle, et les conciliabules tenus chez l’archevêque de Constantinople n’avaient point abouti; l’empereur s’obstinait à vouloir une définition, les évêques s’obstinaient à la refuser, et au fond l’empereur et les évêques étaient dans leur droit.

L’empereur était dans son droit en voulant une formule de foi nette et précise qui pût faire la matière d’une loi et guider les tribunaux chargés de l’appliquer. Chef extérieur de la religion, chargé de protéger par des pénalités légales l’orthodoxie des croyances, il avait raison de réclamer de l’assemblée, seul pouvoir compétent pour définir les dogmes, une rédaction qui, en même temps qu’elle éclairerait la conscience des fidèles, ne laisserait pas l’autorité séculière s’égarer dans les mesures de répression. Il ne suffisait pas, pour tracer la ligne de conduite du gouvernement, qu’une décision synodale eût condamné, au premier concile d’Éphèse, l’erreur de Nestorius; il ne suffirait pas davantage que le présent concile condamnât celle d’Eutychès : il était bon que le législateur dît ce qu’il ne fallait pas croire; mais il était meilleur qu’il indiquât nettement ce qu’il fallait croire. A des déclarations négatives, il fallait en joindre une positive. Cette marche était nécessaire pour que l’action de l’état fût étroitement unie à la vérité des dogmes.

Ces raisons étaient justes, et, pour que l’assemblée ne s’y rendît pas, il fallait qu’elle en eût de son côté d’aussi fortes à leur opposer. Les évêques connaissaient mieux que Marcien et son gouvernement l’état des esprits dans le concile. Ils sentaient bien qu’une réunion de cinq ou six cents membres, appartenant à des églises différentes, ayant traversé des milieux d’opinion très divers, n’aboutirait jamais à une formule brève, explicite, telle que Marcien la désirait. Tenter cette œuvre en discussion générale leur paraissait une chose