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femme. Un officier de la préfecture d’Alexandrie en devint amoureux et l’enleva. Le mari fit sa plainte à l’empereur, et un ordre arriva de la cour pour que sa femme lui fût rendue et le ravisseur puni. Celui-ci se nommait Macarius. Une étroite liaison existait entre Dioscore et lui, comme entre gens qui se rendaient parfois des services de cette espèce. Dioscore le rassura en lui disant : « Sois tranquille, l’ordre ne sera pas exécuté; je suis plus maître ici que l’empereur, et je forcerai bien ton accusateur à déguerpir et à demander miséricorde. » — « Alors, continuait le plaignant, il m’a envoyé un diacre nommé Isidore avec une troupe de bandits qui m’ont enlevé tout ce que je possédais en vêtemens et autres objets à mon usage et à celui de mes enfans, de sorte que je fus obligé de m’enfuir. Tel est Dioscore. D’autres que moi, en grand nombre, ont éprouvé sa fureur, mais la pauvreté ou la crainte les a empêchés de porter leurs plaintes jusqu’à vous. Je vous en supplie, venez à mon secours et au secours de l’Egypte : je demande qu’Agorastès, son syncelle, soit amené ici, interrogé par ce saint concile et confronté avec moi. »

Après la lecture de leur requête, dont ils affirmèrent la sincérité, les quatre Égyptiens sortirent, sauf à être rappelés plus tard, si le concile donnait à leur plainte une suite convenable. L’assemblée reprit ses travaux, et, sous l’émotion de cette scène, elle envoya une troisième sommation, qui n’eut pas plus de succès que les deux autres. Aux nouvelles instances des commissaires, l’accusé se contenta de répondre : « Ce que j’ai dit, je le dis encore; » il répéta ces paroles jusqu’à sept fois dans les explications que les envoyés essayèrent d’avoir avec lui. La sommation d’ailleurs était plus large que les précédentes; elle se rapportait aux accusations privées des quatre Égyptiens comme aux faits de l’assemblée d’Éphèse. « Les accusations de ces hommes sont trop graves, disaient les commissaires; vous devez y répondre et les mettre à néant, pour l’honneur de l’église et la dignité de l’épiscopat. » Toutes les objurgations furent inutiles.

Devant ce refus opiniâtre de comparaître, le concile n’avait plus qu’à juger l’accusé par contumace. « N’y a-t-il pas lieu, dit le président Paschasinus, de le traiter suivant toute la rigueur des canons? » On répondit de toutes parts qu’il en devait être ainsi. Alors les trois légats résumèrent successivement les faits de la cause, tels qu’ils ressortaient des débats de la première action, à quoi ils ajoutèrent d’autres incriminations non mentionnées dans ces débats, par exemple : d’avoir empêché à Éphèse la lecture de la lettre de Léon, et ensuite d’avoir prononcé dans un conciliabule furtif l’excommunication de ce très saint archevêque de Rome. Pour ces motifs et sur ce que, cité par trois fois, il s’était abstenu de