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l’autre était occupé par les Orientaux et leurs amis, qui représentaient à l’assemblée les adversaires du faux concile d’Éphèse et le parti de Flavien. Le livre des Évangiles fut apporté et dressé au milieu de la nef sur un trône ou un autel portatif, comme c’était l’usage.

Quand tout le monde eut pris place, les trois légats se levant de leurs sièges s’avancèrent en face des magistrats, et l’évêque Paschasinus, leur chef, prononça en latin ces mots qui furent traduits en grec par le secrétaire Béronicien. « Les instructions du très heureux et apostolique évêque de l’église de Rome nous défendent de siéger dans ce concile avec Dioscore, archevêque d’Alexandrie, que nous voyons séant ici parmi les juges. Or l’ordre que voici est absolu (et il montra un rouleau de papier qu’il tenait à la main) ; que votre magnificence commande donc à Dioscore de sortir, ou nous sortons à l’instant. — Une plainte particulière existe-t-elle contre le révérendissime archevêque d’Alexandrie, dirent les magistrats, pour que nous lui ordonnions de quitter le rang des évêques ? — Il n’est pas appelé ici pour juger, mais pour être jugé, interrompit le second légat Lucentius. — S’il n’y a pas d’accusation déposée, s’écria une voix, j’en dépose une. » Et Eusèbe de Dorylée, quittant sa place, dit aux magistrats : « J’ai été lésé par Dioscore, la foi a été lésée, Flavien a été tué, ce saint évêque dont je ne puis prononcer le nom sans verser des larmes. Enfin, j’ai été injustement déposé avec lui. J’accuse Dioscore de tout cela et j’ai adressé à ce sujet à notre pieux empereur une requête qu’il vous a renvoyée. Par la tête des maîtres du monde, je demande qu’il en soit fait lecture à l’assemblée ! » Et il alla s’asseoir dans l’enceinte réservée aux accusateurs et aux accusés. Dioscore, sur un avertissement des magistrats, y prit place non loin de lui.

La requête d’Eusèbe fut lue et contenait en les expliquant les griefs qu’il venait d’indiquer. L’ancien avocat était là dans son élément, et il demanda pour la régularité de la procédure qu’on lût après sa requête les actes d’Éphèse, afin que l’assemblée connût bien sur quels faits portait son accusation ; Dioscore requit pareillement cette lecture, puis se rétracta. « Je crois, dit-il, que la première chose est d’examiner entre nous la question de foi. » C’était précisément ce qu’il avait repoussé au faux synode d’Éphèse comme une formalité superflue, et le concile y put voir une première preuve de sa duplicité. « Vous êtes accusé, défendez-vous d’abord, » lui firent observer les magistrats. La lecture des actes d’Éphèse, alors commencée, donna lieu à divers incidens où se dessina d’une façon toute particulière la physionomie du concile.

Les actes ou procès-verbaux de ces assemblées ecclésiastiques étaient très étendus et très complets, et on y annexait d’ordinaire in