Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 98.djvu/603

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
UN MINISTRE
DU ROI PHILIPPE LE BEL

GUILLAUME DE NOGARET[1]
II.
LES APOLOGIES DE NOGARET ET LE PROCÈS DES TEMPLIERS.


I

Nogaret, se présentant devant Philippe le Bel à Béziers, put se vanter de lui avoir fait remporter une difficile victoire. Le plus redoutable adversaire que la royauté française eût jamais trouvé sur son chemin était mort de rage. Nogaret exposa en plein conseil le complet changement qui s’était opéré dans les dispositions de la cour de Rome, insista sur les bonnes intentions du pape Benoît XI, et conseilla d’envoyer une solennelle ambassade au saint-siège avant que le pape eût, selon l’usage, dépêché en France le légat porteur de la bulle d’intronisation. C’était là un avis très prudent ; il y avait trois mois et demi que Benoît était proclamé ; si l’on avait attendu encore et que le légat ne fût pas venu, cette abstention aurait passé pour la confirmation de tous les anathèmes de Boniface. Le roi suivit cette opinion, et désigna pour faire partie de l’ambassade Bérard, ou Béraud, seigneur de Mercœur, Guillaume de Plaisian et le célèbre canoniste Pierre de Belleperche, tous trois amis et associés intimes de Nogaret. Ce qui prouve du reste que la conduite de ce dernier obtint de Philippe une pleine approbation, c’est que nous possédons les actes originaux, datés de Béziers

  1. Voyez la Revue du 15 mars.