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Reprendre la discussion des doctrines condamnées était un danger véritable aux yeux de ceux qui avaient observé l’hésitation de beaucoup d’évêques dans les débats de la définition. Anatolius lui-même n’avait-il pas prononcé ces étranges paroles : « Dioscore a été déposé non point à cause de ses doctrines, mais pour avoir excommunié l’archevêque de Rome et refusé de faire lire sa lettre. » La prudence conseillait donc, en face de ces fermens d’opposition mal éteints, de jeter un voile sur les attentats commis dans le passé. L’empereur le crut, et se contenta de rendre une loi qui réhabilitait la mémoire du martyr Flavien : réhabiliter Flavien, c’était flétrir l’assemblée sous les violences de laquelle il avait perdu la vie. Les légats de leur côté tenaient à une loi de l’empereur, et non à un décret canonique qui renouvellerait la discussion. Ils parurent donc satisfaits de cette abolition virtuelle de l’assemblée d’Éphèse, qui ressortait des actes et des opinions du présent concile, et la déclarèrent suffisante. On renonça de la sorte à une loi expresse ou à un canon exprès contre une assemblée dont il ne survivait plus rien.

La conséquence de ces actes divers fut le rétablissement dans leurs sièges des évêques de Cyr et de Dorylée, Théodoret et Eusèbe : le pape leur avait déjà rendu le rang d’évêque justement, il est vrai, mais peu canoniquement, comme l’avaient fait remarquer les murmures de beaucoup de membres lors de la première action ; le concile leur rendit leurs évêchés. On agita la question de Domnus, ancien patriarche d’Antioche, que Dioscore avait fait déposer malgré sa faiblesse, ou, pour mieux dire, sa lâcheté lors de la condamnation de Flavien. Domnus, honteux de lui-même, avait couru s’enfermer dans le monastère d’où il était sorti pour monter au siège épiscopal d’Antioche. Il voulait finir obscurément ses jours dans la solitude, et ne réclamait point, comme Eusèbe et Théodoret, les grandeurs dont il avait été dépouillé. Pourtant Domnus était pauvre ; ses amis intercédèrent pour lui, et le concile, en considération de sa pénitence, décida que son successeur lui paierait une pension sur les revenus de l’église d’Antioche, et fixa lui-même le taux de cette pension.

Les affaires particulières étaient nombreuses et la plupart intéressantes : elles concernaient des intrusions d’évêques dans des sièges déjà occupés ou des usurpations de juridiction d’un ressort métropolitain sur l’autre. Nous en choisirons une qui nous paraît mériter l’attention pour deux raisons : la première, parce qu’elle offre le vivant tableau des mœurs ecclésiastiques du temps ; la seconde, parce qu’on y trouve un personnage qui a joué un rôle assez important dans ces récits, Étienne, évêque d’Éphèse et exarque ecclésiastique de la province d’Asie.

À l’époque où l’église d’Éphèse gémissait sous la main de cet