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REVUE. — CHRONIQUE.


sion, en dédommageant la compagnie par des terrains situés sur la frontière du nord. L’insurrection est venue à point pour trancher le différend. Le gouverneur Davalos, de connivence avec la maison Cobos, qui fait le commerce de l’orseille, a dispersé les colons. Le consul américain, M. Dekay, a été forcé de s’embarquer, avec son personnel et avec les autorités fédérales, à bord d’un cabotier qui les a transportés à San-Diego. Il paraît d’ailleurs que la compagnie s’était mise dans son tort en aliénant sans autorisation une partie considérable de ses territoires, et en important directement des produits qui auraient dû acquitter des droits de douane au port de La Paz. On croyait que cet incident amènerait une intervention des États-Unis, intervention que M. Juarez aurait lui-même, dit-on, sollicitée, mais le gouvernement de l’Union paraît peu disposé à se mêler des querelles de ménage de ses voisins. L’argent se faisant de plus en plus rare dans les caisses du Mexique, M. Juarez ne pourrait offrir, comme prix du secours que lui accorderait M. Grant, qu’une cession de territoire, et il est peu probable qu’un pareil marché fût ratifié par le congrès.

Le 1er janvier, une proclamation du ministre de la guerre annonçait que le général Rocha venait de battre Porfirio Diaz dans deux rencontres importantes ; à Mexico, les cloches sonnaient à toute volée, la ville était pavoisée, la garnison défilait dans les rues musique en tête. Quelques jours après, Alatorre s’emparaît d’Oajaca, Félix Diaz tombait assassiné, comme on suppose, et le Journal officiel de Mexico publiait un appel au patriotisme de Porfirio Diaz, dont il reconnaissait les mérites personnels. Dans le nord, le général juariste Corlina tenait toujours en échec Quiroga, qui avait des forces supérieures ; on se battait périodiquement dans les environs de Matamoros et de Camargo. Vers le 9 février au contraire, on annonçait que les fédéraux sous le général Neri venaient de perdre une bataille contre les rebelles commandés par Guerra, entre Zacatecas’ et San-Luis Potosi ; puis Marquez remportait un succès signalé dans Sinaloa sur le gouverneur juariste. Un moment, la cause de Juarez semblait très compromise. Les rebelles étaient au nombre de 30,000 hommes. On parlait d’invoquer le protectorat américain. Un fort parti proposait de détacher du Mexique les états de Chiapas, Tabasco, Oajaca, Tehuantepec, pour les réunir au Guatemala, dont les frontières touchent aux frontières mexicaines, et qui, soit dit en passant, vient de s’affranchir de la domination des jésuites en les expulsant du pays en même temps que l’archevêque de l’Amérique centrale, don Bernardo Pinol. Les dernières nouvelles que l’on a du Mexique affirmaient cependant que Porfirio Diaz était mort d’une dyssenterie, le 12 février, dans les montagnes de Queretaro, que ses partisans avaient passé en partie dans le camp lerdiste, que les généraux juaristes Rocha et Corella tenaient tête à Trevifio, Guerra et Martinez devant San-Luis Potosi, où se concentrait l’action. Ces nouvelles concordent mal avec les bruits qui représentent la cause de