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analyse et synthèse de la fonction vitale, puisque la destruction successive des diverses parties du cerveau a supprimé successivement ses diverses manifestations fonctionnelles, et que la reproduction successive de ces mêmes parties a fait reparaître ces mêmes manifestations. Il est inutile d’ajouter que la même chose arrive pour toutes les autres parties du corps susceptibles de rédintégration.

Les maladies, qui ne sont au fond que des perturbations vitales apportées par la nature au lieu d’être provoquées par la main du physiologiste, affectent le cerveau suivant les lois ordinaires de la pathologie, c’est-à-dire en donnant naissance à des troubles fonctionnels qui sont toujours en rapport avec la nature et le siége de la lésion. En un mot, le cerveau a son anatomie pathologique au même titre que tous les organes de l’économie, et la pathologie cérébrale a sa symptomatologie spéciale comme celle des autres organes. Dans l’aliénation mentale, nous voyons les troubles les plus extraordinaires de la raison, dont l’étude est une mine féconde où peuvent puiser le physiologiste et le philosophe ; mais les diverses formes de la folie ou du délire ne sont que des dérangemens de la fonction normale du cerveau, et ces altérations de fonctions sont, dans l’organe cérébral comme dans les autres, liées à des altérations anatomiques constantes. Si, dans beaucoup de circonstances, elles ne sont point encore connues, il faut en accuser l’imperfection seule de nos moyens d’investigation. D’ailleurs ne voyons-nous pas certains poisons tels que l’opium, le curare, paralyser les nerfs et le cerveau sans qu’on puisse découvrir dans la substance nerveuse aucune altération visible ? Cependant nous sommes certains que ces altérations existent, car admettre le contraire serait admettre un effet sans cause. Quand le poison a cessé d’agir, nous voyons les troubles intellectuels disparaître et l’état normal revenir. Il en est de même quand les lésions pathologiques guérissent, les troubles de l’intelligence cessent et la raison revient. La pathologie nous fournit donc encore ici une sorte d’analyse et de synthèse fonctionnelle, comme cela se voit dans les expériences de rédintégration. La maladie en effet supprime plus ou moins complètement la fonction en altérant plus ou moins complètement la texture de l’organe, et la guérison restitue la fonction en rétablissant l’état organique normal.

Si les manifestations fonctionnelles du cerveau ont été les premières qui ont attiré l’attention des philosophes, elles seront certainement les dernières qu’expliquera le physiologiste. Nous pensons que les progrès de la science moderne permettent aujourd’hui d’aborder la physiologie du cerveau ; mais avant d’entrer dans l’étude