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reprennent leur activité. Des faits analogues à ceux observés chez les animaux ont été vus directement sur le cerveau de l’homme. Sur un individu victime d’un épouvantable accident de chemin de fer, on eut l’occasion d’observer une perte de substance considérable. Le cerveau apparaissait dans une étendue de 3 pouces de long sur 6 de large. Le blessé présentait de fréquentes et graves attaques d’épilepsie et de coma, pendant lesquelles le cerveau s’élevait invariablement. Après ces attaques, le sommeil survenait, et la hernie cérébrale s’affaissait graduellement. Lorsque le malade était réveillé, le cerveau faisait de nouveau saillie, et se mettait de niveau avec la surface de la table externe de l’os. À la suite d’une fracture du crâne, on observa chez un autre blessé la circulation cérébrale pendant l’administration des anesthésiques. Au début de l’inhalation, la surface cérébrale devenait arborescente et injectée ; l’hémorrhagie et les mouvemens du cerveau augmentaient, puis, au moment du sommeil, la surface du cerveau s’affaissait peu à peu au-dessous de l’ouverture, en même temps qu’elle devenait relativement pâle et anémiée.

En résumé, le cerveau est soumis à la loi commune qui régit la circulation du sang dans tous les organes. En vertu de cette loi, quand les organes sommeillent et que les fonctions en sont suspendues, la circulation y devient moins active ; elle augmente au contraire dès que la fonction vient à se manifester. Le cerveau, je le répète, ne fait pas exception à cette loi générale, comme on l’avait cru, car il est prouvé aujourd’hui que l’état de sommeil coïncide non pas avec la congestion, mais au contraire avec l’anémie du cerveau.

Si maintenant nous cherchons à comprendre les relations qui peuvent exister entre la suractivité circulatoire du sang et l’état fonctionnel des organes, nous verrons facilement que cet afflux plus considérable du liquide sanguin est en rapport avec une plus grande intensité dans les métamorphoses chimiques qui s’opèrent au sein des tissus, ainsi qu’avec un accroissement dans les phénomènes caloriques qui en sont la conséquence nécessaire et immédiate. La production de la chaleur dans les êtres vivans est un fait constaté dès la plus haute antiquité ; mais les anciens eurent des idées fausses sur l’origine de la chaleur : ils l’attribuèrent à une puissance organique innée ayant son siége dans le cœur, foyer où bouillonnent le sang et les passions. Plus tard, le poumon fut considéré comme une sorte de calorifère dans lequel la masse du sang venait tour à tour puiser la chaleur que la circulation était chargée de distribuer à tout le corps. Les progrès de la physiologie moderne ont prouvé que toutes ces localisations absolues des conditions de la vie sont