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M. le comte Xavier Braniçki. Voici comment on raisonne : il nous faut 3 milliards pour payer les Prussiens ; or le capital du pays, sous forme matérielle, étant d’environ 150 milliards, chacun devra supporter sur son avoir un impôt de 2 pour 100, Grâce à ce retranchement opéré sur toutes les fortunes, le territoire sera libéré, la confiance renaîtra, l’industrie et le commerce prendront tout leur essor, et on obtiendra bien vite par la plus-value du reste la compensation du sacrifice qu’on aura fait. Ce système ne laisse pas d’exercer quelque séduction, et bien des personnes seraient disposées à l’accepter, si on pouvait démontrer qu’il est praticable. Cependant les difficultés ne tardent pas à se produire. Tout d’abord relevons une certaine injustice. Le capital matériel qu’on prétend imposer ne constitue pas à lui seul la richesse d’un pays ; il y en a un autre considérable aussi, qui est dans la tête du savant, du mécanicien, de l’avocat, du médecin : c’est ce qu’on appelle le capital immatériel, avec lequel on se procure des revenus souvent fort importans. Ce capital immatériel échappant à l’impôt, le médecin et l’avocat qui gagnent 100,000 fr. par an n’auront rien à payer, tandis que le propriétaire de 10,000 fr. en terres, qui rapportent 200 ou 300 fr. par an, devra supporter tout à coup une rançon extraordinaire de 200 francs. Si l’on se décide d’autre part à tenir compte de cette seconde forme du capital, comment l’évaluer sans tomber dans des appréciations arbitraires ? A-t-on pensé enfin à ce qu’il conviendrait de demander pour les collections d’art, pour les statues et les tableaux, pour tout ce capital de luxe qui ne rapporte rien, mais qui fait la gloire d’une nation ? Si on le taxe fortement, on risque de le voir diminuer et s’en aller à l’étranger.

En second lieu, la réalisation de l’impôt forcé ne serait pas facile. On serait obligé de s’enquérir de la fortune de chacun : se contenterait-on d’une simple déclaration, ou bien aurait-on recours à des moyens de contrôle ? Dans le premier cas, on aurait à craindre la fraude ; dans le second, le contrôle pourrait devenir vexatoire et ne pas donner toujours des résultats exacts. Dès le début, l’impôt sur le capital se trouve donc en présence de grosses difficultés ; mais nous voulons le supposer établi et équitablement réparti : comment s’en fera la perception ? Le propriétaire de terres ou d’autres valeurs pour 10,000 francs n’aura pas immédiatement 200 francs disponibles à donner à l’état ; il aura besoin de ses ressources pour faire valoir sa terre ou subvenir à ses besoins quotidiens. L’objection est prévue ; il empruntera comme dans le système précédent ; des établissemens de crédit avanceront tout l’argent nécessaire soit en émettant des lettres de gage comme le Crédit foncier, soit en prêtant sur dépôt de valeurs comme la Banque de France et d’autres institutions. Laissons de côté les charges supplémen-