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Cette religion a été de nos jours l’objet de savans travaux. Nous savons désormais que, de toutes les religions polythéistes, c’est elle sans contredit qui l’est le moins, et qu’au point de vue de la pureté morale elle tient une place de premier rang. Si une religion pouvait influer sur les directions nouvelles prises par la pensée religieuse d’Israël, c’était assurément celle de Zoroastre. Ahura-Mazda, Ormuzd, le dieu suprême des Perses, finit par ressembler beaucoup à Jehovah. Les esprits qui environnent son trône ont plus d’un? analogie avec les armées célestes dont Jehovah Zebaoth est le chef. Comme le mosaïsme, le parsisme interdit la fabrication des images divines. Les deux religions prêchent une morale sévère, et attachent une très haute importance à la pureté légale. Enfin les ressemblances dans la manière de concevoir les origines de l’humanité et l’apparition du mal moral sont telles qu’il faut de toute nécessité admettre un mythe primitif commun conservé avec des variantes par les deux traditions.

Il est donc facile de comprendre que, frappés de ces analogies et ne voulant pas admettre qu’un grand peuple vainqueur puisse emprunter de nouvelles croyances à une peuplade vaincue, plusieurs savans aient pensé que tout le judaïsme postérieur à la captivité est d’origine perse. Pourtant, sous cette forme absolue, leur thèse est complètement fausse ; mais n’exagérons pas la thèse opposée. Si l’on ne peut désormais contester l’originalité religieuse et la persistance des traits fondamentaux du vieux mosaïsme dans la religion renouvelée par Ézéchiel, Esdras et Néhémie, rien n’empêche d’attribuer à l’influence des Perses les développemens considérables que prirent, depuis la conquête de Cyrus, beaucoup de germes préexistans. Par exemple, la législation d’Esdras abonde en préceptes sur le pur et l’impur, renforçant beaucoup la rigueur des lois de la période antérieure; ceux qui l’ont composée n’ont-ils pas été encouragés et guidés par l’expérience qu’ils pouvaient faire de visu, en apprenant à connaître la vie des Perses, de la force que des préceptes de ce genre, une fois adoptés, communiquent à une religion populaire? Seulement il ne faudrait pas se représenter ce genre d’emprunt comme réfléchi et calculé. Le sens aristocratique du Juif se fût révolté à l’idée qu’il gagnait à se conformer à des mœurs étrangères. C’est par une action indirecte, souvent inconsciente, que des coutumes et des croyances nouvelles purent s’infiltrer chez quelques Juifs, acquérir ainsi une espèce de naturalisation et s’enraciner enfin dans la majorité comme une plante poussée spontanément. Nous ne voyons guère que la fête des Purim, totalement inconnue à l’ancien mosaïsme et célébrée depuis lors par les Juifs, qui la rattachent au souvenir d’Esther, nous ne voyons guère, disons-nous, que cette fête qui puisse passer pour une importation