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de scories. L’industrie moderne est venue à son tour tirer parti de ces restes oubliés, et elle a eu à lutter non-seulement contre la nature, mais aussi contre les hommes ; la protection des intérêts engagés a même provoqué dans ces derniers temps l’intervention diplomatique de la France et de l’Italie. La question du Laurium présente donc, outre un intérêt historique et archéologique, un caractère d’actualité dû à l’importance internationale qu’elle vient d’acquérir.


I

On s’accorde généralement à désigner sous le nom de Laurium le large promontoire qui forme la partie méridionale de l’Attique, et qui se termine au sud par le cap Colonne, autrefois cap Sunium. C’est une contrée montagneuse dont le sol aride se compose principalement de micaschistes et de calcaires-marbres métamorphiques. L’altitude moyenne des sommets varie de 200 à 300 mètres. Les côtes sont dentelées de criques et de baies, dont plusieurs constituent des ports naturels très sûrs. Tels sont notamment les ports de Thorico (port Mandri) et d’Ergastiria que protège contre les vents et la mer du large l’île longue et étroite de Makronisi, et qui, par les mauvais temps, servent de refuge aux navigateurs. Makronisi est l’ancienne île d’Hélène ou de Cranaa. Strabon la décrit comme âpre et déserte, et elle n’a pas changé depuis lors. Plus au sud et à l’ouest du cap Sunium est l’île aux Anes, autrefois île de Patrocle, qui tirait son nom du préfet de la flotte égyptienne envoyée par le fils de Ptolémée Lagus au secours des Athéniens.

Cette contrée, essentiellement maritime, était habitée par une nombreuse population de matelots, parmi lesquels Athènes recrutait le personnel de ses flottes, tandis que les autres dèmes fournissaient surtout des soldats. Les villes étaient presque toutes bâties sur le littoral. C’étaient l’antique Thorico, l’une des douze villes fondées dans l’Attique par Cécrops, et qui fut fortifiée pendant la vingt-quatrième année de la guerre du Péloponèse ; on y voit encore les ruines d’un temple, d’un théâtre, les restes d’une acropole et des décombres considérables ; — Anaphlystos, célèbre par ses poteries recouvertes d’un vernis brillant, et où s’élevaient les temples du dieu Pan et de la Vénus Coliade ; s’il faut en juger par un passage d’Aristophane, les mœurs des habitans se ressentaient du choix de leurs divinités protectrices ; — Sunium, qui fut fortifiée pendant la dix-neuvième année de la guerre du Péloponèse, afin de protéger les navires chargés de blés se rendant de l’Eubée à la capitale ; la ville était bâtie au pied du célèbre promontoire que surmontent aujourd’hui les ruines du temple de la Minerve Suniade.