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membres d’une famille dont l’unique héritière épousa un Frédéric de Zollern, cadet de la maison, vers l’an 1192. On obtint facilement de l’empereur Henri VI, de Souabe, la collation du burgraviat vacant en faveur du gendre du nouveau titulaire, et de là est partie la bifurcation des deux branches franconienne et souabe de la maison de Zollern ; de là vient la seconde dynastie des burgraves de Nuremberg, qui apparaît alors sur la scène du monde, exerce bientôt une influence véritable sur les affaires d’Allemagne, et ouvre aux Zollern la carrière de la politique.

Nous laisserons désormais à l’écart la branche aînée ou souabe des Hohenzollern, qui a peu à peu étendu ses domaines, par succession, par achat ou autrement, jusqu’aux limites actuelles de ses principautés, où elle a vécu sans faire trop de bruit avec son titre comtal pendant plusieurs siècles encore, et qui n’a même obtenu le titre princier qu’en 1623, et l’introduction dans le collège des princes de la diète germanique, avec admission à voix et séance, qu’en l’an 1653 seulement. Elle a vendu sa souveraineté à la maison régnante de Prusse, par acte du 7 décembre 1849, en se réservant le domaine utile de ses biens, et a reçu en échange le 26 mars 1850 les titres, honneurs et prérogatives des princes puînés de la maison royale. On connaît les ambitions que cette promotion attardée a fait naître de nos jours. Retournons à Nuremberg. Le spectacle de ses richesses et de son activité a fait révolution dans l’esprit de ses nouveaux burgraves. Rapprochés des Staufen par un office de la couronne, de l’opulence par l’habitation d’une des villes les plus riches de leur temps, ils rendirent d’utiles services et travaillèrent à leur fortune. Ils suivirent Frédéric II en Italie, furent dévoués à sa race, firent de bonnes alliances, et augmentèrent par des acquisitions opportunes l’importance du fief confié à leur garde. A la troisième génération, ils produisaient un homme, premier fondateur de la grandeur de la maison, un autre Frédéric de Zollern, dont la longue existence fut signalée par des actes éclatans, aussi avantageux pour l’Allemagne que pour lui-même. Devenu par sa considération et par son mérite un des personnages marquans de son époque, il a contribué à tirer l’Allemagne de l’anarchie du grand interrègne, et, quoique n’étant pas prince de l’empire, il a exercé sur la fameuse élection de 1273 une influence décisive en faisant couronner empereur Rodolphe de Habsbourg, son ami, dont l’épouse était sa proche parente. Aussi le lendemain du couronnement en reçut-il la récompense par la transformation du burgraviat révocable en burgraviat héréditaire, transmissible aux filles, augmenté d’attributions productives et nouvelles[1], et, croit-on, de la dignité

  1. Voyez Böhmer, Regesten, p. 58 ; Pfeffel, t. Ier, p. 458 (1777). « Rodolphe, dit ce dernier, récompensa le zèle de Frédéric de Hohenzollern, son neveu (erreur, son allié seulement), à qui il devait son élévation, en l’investissant héréditairement du burgraviat que ses ancêtres avaient tenu de la grâce des empereurs. Il y ajouta quelques débris du domaine de Franconie et érigea le tout en principauté. »