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justement de les prévoir et de le vaincre, et c’est par où le praticien supérieur se distingue de l’autre.

Tandis que M. Sédillot enseigne et démontre qu’il est nécessaire, dans l’intérêt de la régénération osseuse et du rétablissement du membre, de n’éliminer que la partie malade des os compromis et d’en conserver la couche saine adhérente au périoste, quelques chirurgiens veulent qu’on enlève tout, excepté le périoste, c’est-à-dire qu’on en retire l’os à peu près comme on retire le doigt d’un gant. Ils prétendent que cette membrane étant l’agent exclusif de la production des os, ceux-ci peuvent être réséqués en totalité et doivent se reproduire complètement du moment quelle est ménagée. Deux praticiens distingués, M. Larghi, de Verceil, et après lui M. Ollier, de Lyon, ont préconisé cette façon d’opérer, à laquelle on a donné le nom de méthode des résections sous-périostées. La légitimité d’un tel procédé opératoire, après avoir soulevé des doutes parmi les chirurgiens qui eurent occasion d’en entreprendre un examen direct, est aujourd’hui presque unanimement rejetée. Les raisons en sont décisives. Comment admettre en effet que le périoste seul, c’est-à-dire une gaine molle, sans appui et sans consistance, mise à nu par une opération sanglante, plus ou moins altérée par la dissection, déterminera la reproduction d’un os, avec sa forme et ses dimensions normales, quand il est déjà si difficile d’obtenir sans raccourcissement la consolidation d’une simple fracture ? Cette gaîne, perdue au milieu de la masse musculaire, ne sera-t-elle pas exposée à des inflammations de toute sorte et surtout à l’influence des causes mécaniques nombreuses qui pourront la déformer et par suite donner lieu à la production d’un os irrégulier, raccourci, impropre à d’utiles services ? Telles sont les objections et les craintes qui frappèrent les chirurgiens et les détournèrent des résections sous-périostées. Celles-ci ont permis dans certains cas la régénération de l’os enlevé, mais dans des conditions telles que le membre a perdu toute force et toute mobilité et n’a pu échapper à une suppuration interminable et funeste. Il ne s’agit pas seulement en chirurgie de reproduire des os, il en faut reconstituer d’assez réguliers dans leur forme et d’assez résistans dans leur structure pour assurer les usages des membres. Or un tel résultat n’est atteint qu’en maintenant la régularité et l’immobilité des surfaces, gaines ou moules, où doivent se déposer et s’agglomérer Les cellules du nouvel os. La méthode de l’évidement réalise l’existence de ce moule fixe et invariable en conservant un fourreau d’os dans les meilleures conditions pour provoquer une genèse nouvelle de tissu osseux, tandis que celle des résections sous-périostées attend la régénération de l’organe, d’un périoste sans soutien, détérioré, affaissé et plissé