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depuis quelques jours on a fait du chemin vers ce dénoûment, et peut-être a-t-on fait aujourd’hui même un pas de plus dans un vote qui a de nouveau partagé l’assemblée à la suite d’une interpellation sur des adresses de conseils municipaux. Les violens peuvent se laisser aller à ces extrémités, les esprits modérés de la droite et du centre droit y réfléchiront encore, ils se mettront du côté de la politique de M. de Richelieu et de M. Decazes plutôt que du côté de la politique des introuvables.

CH. DE MAZADE.




LA NOUVELLE RÉVOLUTION DU PÉROU.

Bien des révolutions, des coups d’état, des pronunciamentos, se sont produits au Pérou depuis son émancipation ; mais ce pays, si souvent déchiré par les discordes civiles, a rarement vu des scènes aussi tragiques, des drames aussi sanglans que ceux dont la ville de Lima a été le théâtre au mois de juillet dernier. Heureusement la crise, malgré sa violence, n’a été que passagère ; au moment où l’armée était dispersée, la police licenciée, l’administration désorganisée, où le pays tout entier se croyait réservé à des troubles dont ceux de la capitale ne semblaient être que le début, les choses se sont remises instantanément dans un état normal, les institutions parlementaires ont repris leur cours, et le Pérou a trouvé une solution des difficultés avec lesquelles il était aux prises, non pas dans des mouvemens insurrectionnels, mais dans la stricte application de la légalité. C’est le congrès qui, conformément à la constitution, a présidé à la transmission du pouvoir avec des conditions d’ordre et de calme sur lesquelles les optimistes eux-mêmes n’eussent point osé compter. Le jour se fait maintenant sur les causes et sur les effets d’événemens enveloppés tout d’abord d’un nuage sinistre qui empêchait d’en apprécier le caractère. Les esprits sont entrés dans une période d’apaisement relatif, et la dernière crise a fait naître plus d’une réflexion salutaire. Les auteurs des violences commises ont reçu un châtiment si rapide, leur succès d’un jour a été si cruellement expié, le danger des coups d’état s’est fait sentir d’une manière si terrible et si saisissante, qu’il y a lieu d’espérer après la tourmente l’accalmie, après le déchaînement des haines la conciliation.

Le nouveau président de la république péruvienne, don Manuel Pardo, a pris une attitude satisfaisante, et, bien qu’il ait marqué comme chef du parti libéral, il s’est attaché à ne pas froisser les conservateurs. Son influence modératrice a déjà produit de bons résultats. Le discours-message qu’il a prononcé le 2 août 1872 devant le congrès a été favorable-