Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 102.djvu/429

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

peut mieux assise. Il est aussi une habitude prise par la direction dans la rédaction des rapports présentés aux assemblées générales des actionnaires, faite pour gagner toute leur confiance. On y donne la liste très exacte de toutes les actions et obligations des sociétés industrielles que la Société générale possède, du revenu qu’elles rapportent, et on les évalue dans le bilan au prix de revient. Cet exposé sincère, qu’aucune de nos sociétés n’a encore entièrement imité, présente un résultat d’autant plus satisfaisant que presque toutes les entreprises dans lesquelles la Société générale s’est intéressée sont entrées dans la période des profits ; il donne lieu aussi de remarquer avec quel scrupule la direction n’emploie dans des placemens industriels ou de réalisation différée que le capital même de la société, actions et réserves, ayant soin de représenter par son encaisse, son portefeuille ou des placemens en fonds publics, les ressources que le public lui procure à échéance plus ou moins courte. Cette prudence de conduite et cet équilibre maintenu entre les exigibilités et les disponibilités méritent d’être proposés comme un bon exemple à suivre.

Nous ferons aux procédés de la Société générale belge deux légères critiques. D’abord, dans la création de titres différens pour l’action et la part de réserve, il semble que c’est à celle-ci que devrait être attribué l’intérêt de 5 pour 100, variable selon l’importance de la réserve même, et à l’action le dividende variable selon l’importance des bénéfices. La réserve représente l’économie, l’amortissement du capital primitif. Qu’un intéressé veuille réaliser son bénéfice passé et néanmoins rester associé aux chances de l’avenir, il le pourrait, si après la vente de sa part de réserve l’action lui gardait des éventualités autres que la perception d’un intérêt fixe. Nous remarquerons enfin que peut-être la Société générale belge, trop fière de sa fortune, s’endort un peu dans cette brillante situation. Après avoir tant fait pour l’industrie nationale, pour le crédit de l’état, après avoir sauvé l’institution des caisses d’épargne en 1831 en se chargeant de remplir les engagemens que les caisses particulières, à commencer par la caisse d’épargne de Bruxelles, ne pouvaient tenir, — après avoir inauguré le système des chèques et celui de l’émission des obligations à vue et à intérêt journalier, il. y a lieu de s’étonner aujourd’hui que la Société générale ne soit pas avec le public dans des rapports plus étendus. Au bilan de 1871, les engagemens de la société envers les tiers n’atteignent pas la somme représentée par ses ressources sociales proprement dites ; elle n’avait en dépôt que 12 millions pour le compte des caisses d’épargne, 31 millions en émission d’obligations et promesses, tandis que l’avoir seul des actionnaires s’élevait à plus de 75 millions. Cette proportion