l’apogée de sa splendeur et de sa prospérité. De grandes choses avaient été faites : on avait créé une armée toute nouvelle, qui comptait 25,000 hommes disponibles et 33,000 hommes sur les états; on avait constitué toute une hiérarchie nouvelle d’administrations, de conseils consultatifs, de tribunaux ; on avait fait prévaloir partout le principe de l’égalité devant la loi ; la terre et la personne avaient été affranchies, le justiciable avait la garantie du jury et de la procédure publique; le contribuable ne portait plus la part de fardeau des privilégiés; le paysan avait été affranchi des derniers restes du servage, l’artisan des entraves des corporations, le dissident religieux des prétentions des églises d’état. Le Brunswickois, le Hessois, le Prussien, le Hanovrien, naguère si différens de caractère, d’éducation, de principes, de civilisation, avaient commencé à prendre un esprit de solidarité et à concevoir un certain patriotisme westphalien.
Le revers de la médaille est que « l’amalgame » entre les Français et les Allemands ne se faisait pas aussi bien, que les passions germaniques subsistaient et grandissaient dans bon nombre de localités, que l’intervention perpétuelle de Napoléon dans les affaires westphaliennes ne permettait pas aux Allemands d’oublier la conquête, que de perpétuelles conspirations ne permettaient pas au roi d’oublier que beaucoup de ses sujets étaient ses ennemis. La perte presque totale d’une division westphalienne en Espagne avait fait très mauvais effet dans l’armée; on entendait dire aux soldats « qu’ils n’iraient ni là ni en Pologne, qu’on pouvait les fusiller, mais qu’ils ne marcheraient point. »
Certaines parties du royaume étaient devenues presque irréconciliables : ainsi le pays de Hesse-Cassel si souvent agité par les révoltes, la ville de Hanovre, qui avait cessé d’être une capitale et où une maison de 40,000 francs se donnait pour 6,000, celle de Magdebourg, qui succombait sous le poids d’une garnison française de 12,000 hommes (dont 7,000 à la charge du bourgeois), et qui voyait son commerce presque entièrement ruiné. A Brunswick même, à la fin de janvier 1812, il y avait eu une rixe entre soldats français et westphaliens, et la populace de Brunswick, qui est « très insolente, » ainsi que les polissons, « qui sont ici plus polissons qu’ailleurs, » s’en étaient mêlés. Dans plusieurs petites émeutes de ce genre, des soldats avaient été tués. Napoléon, se substituant à son frère, avait fait prendre des mesures par trop exceptionnelles, exigé de nombreuses arrestations, institué des commissions extraordinaires, fait entrer à Brunswick des régimens français mèche allumée. Reinhard ne pouvait assez déplorer ce luxe de répression.
A Cassel, les choses allaient un peu mieux. Cette ville avait déjà