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zan, de décréter l’interruption de toute communication et d’empêcher les pèlerinages en cas d’invasion constatée du choléra dans les pays limitrophes. Bref, la situation est fort améliorée en ce qui concerne l’hygiène intérieure de la Perse, elle s’améliore chaque jour davantage, et c’est un grand point; mais une nouvelle question se pose maintenant : comment empêcher le choléra de passer d’Asie en Europe? C’est une des plus sérieuses difficultés de la police sanitaire et de l’hygiène internationale. Examinons ce qui a été fait pour la résoudre et dans quelle mesure on y a réussi ou plutôt on peut espérer d’y réussir.

Le choléra vient d’Asie en Europe par terre et par mer, c’est-à-dire par la frontière russo-persane et par la mer Caspienne. Il peut y arriver aussi à travers la Méditerranée, soit de l’Asie-Mineure, soit de l’Egypte, et par conséquent il y a lieu d’en empêcher l’importation dans ces deux pays par les frontières qui les séparent soit de la Perse, soit de l’Arabie. Cette simple indication géographique montre l’étendue et la complexité du système de préservation qu’il s’agit d’établir. Tous les gouvernemens européens ont mis une diligente activité à organiser l’ensemble des mesures prophylactiques et à préparer le fonctionnement des institutions sanitaires recommandées par les membres de la conférence, c’est-à-dire le service des quarantaines. Il serait prématuré de se prononcer d’une façon définitive sur l’efficacité des quarantaines; il convient pourtant de dire qu’un certain nombre de médecins compétens la nient sans réserve, et qu’une telle opinion est malheureusement trop justifiée par les faits.

M. Proust, qui a exploré avec soin la frontière russo-persane, où la Russie a établi des quarantaines et des postes de cosaques, croit qu’on peut exercer sur ce parcours une surveillance assez active pour empêcher de ce côté le passage du choléra. Il avoue toutefois que sur quelques points il est difficile de s’opposer à la circulation des contrebandiers. Pour ce qui est de l’importation par la mer Caspienne, la question est moins simple. Tous les navires qui s’éloignent du littoral persan de ce grand lac ont pour objectif, du côté russe, un certain nombre de ports dont les principaux sont Bakou, Derbent et Astrakan. Quelques-uns de ces ports ont des lazarets; d’autres, comme Astrakan, ne possèdent aucun établissement sanitaire. Le personnel ne semble pas non plus suffisant; nulle part, la visite et l’interrogatoire des passagers ne sont faits sérieusement. Voilà du moins ce qu’a vu M. Proust. Ce médecin a insisté auprès des gouvernemens de Russie et du Caucase pour obtenir un contrôle plus effectif et plus sévère. Il a réclamé surtout l’installation de postes de surveillance le long du littoral, de façon à empêcher au besoin le débarquement des navires qui voudraient enfreindre