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nue sur les bords du Weser, il dut, pour étouffer les troubles de la Hesse, prescrire des incendies et des fusillades.

Un décret du 23 octobre 1806 avait établi pour les pays en-deçà de l’Elbe, conquis à la suite de la bataille d’Iéna, cinq gouvernemens militaires; le général Loison s’installait à Munster et administrait une partie de la Westphalie prussienne, le général Gobert à Minden, le général Bisson à Brunswick, le général Thiébaut à Fulda, le général Clarke à Erfurt. A côté de chacun d’eux, un inspecteur ou sous-inspecteur aux revues était chargé, avec le titre d’intendant, de l’administration civile : il était nommé par l’intendant-général Daru et correspondait tous les jours avec l’inspecteur en chef Villemanzy; il était assisté d’un receveur dépendant de M. de La Bouillerie, receveur-général des contributions de la grande armée. Quand la Hesse-Cassel eut été occupée, elle forma un sixième gouvernement sous les ordres du général Lagrange et l’administration civile de l’intendant Martillière. Le gouverneur-général de Cassel était, au dire même des Allemands, « un homme de vieille honnêteté française, qui accomplissait à regret les ordres rigoureux de l’empereur, qui faisait tout pour le mieux et prenait volontiers conseil sur les choses qui en sa qualité d’étranger ne lui étaient pas familières. » Il allait avoir à donner la preuve de sa modération et de son humanité.

Il arriva à Cassel le 4 novembre 1806, au moment où la Hesse n’était plus guère occupée que par une poignée de conscrits français et italiens sous la surveillance du commissaire-ordonnateur Monnay. L’avant-veille, le roi Louis avait quitté Cassel, et Mortier avait poursuivi sa route pour aller accomplir les décrets de l’empereur sur l’Allemagne du nord. Lagrange adressa une proclamation rassurante aux habitans de l’électorat : les fonctionnaires du prince déchu restèrent en place, les impôts durent être perçus, la justice rendue, le pays administré comme par le passé. On se contenta de faire enlever les armes électorales sur les monumens publics. Enfin on institua une commission chargée de veiller à l’égale répartition des logemens militaires et des réquisitions.

Les instructions de l’empereur portaient que l’on s’occuperait activement de la démolition des places de Hanau, Marburg, etc., de la vieille forteresse féodale de Ziegenhain, qui avait soutenu tant de sièges au XVIe et au XVIIe siècle, et dont on disait dans le pays : fort comme Ziegenhain. Dans toutes ses lettres, il insiste sur la nécessité de désarmer soldats et habitans : il connaissait trop bien le caractère violent et belliqueux des anciens Cattes, leur attachement aveugle à la maison électorale, qui les faisait appeler dans toute l’Allemagne les chiens de la Hesse. Il fallait se hâter de mettre à profit les premiers momens et la première surprise. Le décret du