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deux siècles, tenant peut-être à ôter toute frayeur de ce côté aux gens disposés à venir augmenter la colonie. Flacourt disait vrai ; les serpens de la grande île africaine sont des bêtes inoffensives. Le plus grand est une sorte de couleuvre[1] ; d’autres, les langaha des Malgaches, ne se font remarquer que par la singularité d’un caractère : ils ont le museau prolongé par un appendice formé de peau[2]. Les sauriens ou lézards du pays sont assez variés ; les gerrhosaures de la famille des scinques sont les plus jolis. Couverts de larges écailles luisantes, ils ont sur un fond olive ou fauve des bandes noires et blanches ou jaunes et des taches régulièrement dessinées ; animaux sans défense, ils se cachent sous les pierres, dans la mousse, sous les vieux bois, et se réfugient dans des trous ; mais la Grande-Terre est vraiment le pays des caméléons. Très fréquemment, au milieu des forêts on voit ces curieux animaux accrochés sur les branches, calmes, immobiles, roulant de gros yeux ; il y en a une très grosse espèce, plusieurs petites. Les tortues de terre ou de marais qu’on rencontre à Madagascar ont en général des dimensions médiocres ; la tortue rayonnée[3] est fort joliment peinte de couleurs noire et jaune. Le seul reptile qu’où redoute, c’est le crocodile. On assure qu’il est commun dans plusieurs rivières et dans les lacs situés sur la côte orientale. Les nègres, dit-on, évitent autant que possible de se mettre à l’eau de peur des crocodiles ; mais avec la peur le nombre augmente et le danger grossit. En réalité, les accidens paraissent être bien rares.

On parle beaucoup de l’abondance des poissons dans les rivières et surtout dans certains lacs de Madagascar. Par malheur, personne n’a pris soin de les recueillir. C’est à peine si l’on a fait connaître trois ou quatre espèces : une sorte de perche qui ressemble beaucoup à des espèces de l’Inde et quelques cyprins[4]. Ici, l’ignorance est regrettable : on est bien assuré que les poissons des eaux douces n’ont pas traversé les mers ; la comparaison des espèces de la grande île avec celles des autres régions du monde donnerait lieu inévitablement à d’intéressantes remarques.

La condition d’une partie considérable de l’île, — des forêts humides, des marécages, des étangs, des lacs, des ruisseaux, des rivières de tout genre, — annonce l’abondance des mollusques ter-

  1. Pelophilus madagascariensis.
  2. Langaha nasuta et Langaha crista-galli. Les zoologistes ont retenu le nom du pays.
  3. Testudo radiata.
  4. Nous ne croyons pas devoir nous occuper ici des poissons ou des autres animaux marins, car il serait impossible d’appeler l’attention sur ce sujet sans traiter de toute la faune de l’Océan indien.