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être les cadres de petites fenêtres bien alignées. Pendant la saison de la sécheresse, tout se flétrit : seules les racines, puisant dans la terre un peu d’humidité, ne périssent pas ; le jour où les pluies viennent remplir le lit de la rivière, s’élance une nouvelle végétation. L’ouvirandre, sorte de merveille aux yeux du botaniste, fournit aux Malgaches une ressource alimentaire ; la racine est fort estimée. Flacoart n’en avait point appris davantage ; Du-Petit-Thouars le premier a donné une description de la plante, qu’on a pu voir de nos jours dans les serres de quelques villes d’Europe. Longtemps la curieuse plante demeura le représentant unique d’un genre extrêmement particulier ; il y a trente et quelques années, M. Bernier, médecin de la marine, s’occupant avec ardeur de l’histoire naturelle de la grande île africaine, a découvert une seconde espèce d’ouvirandre qui a été l’objet d’une étude de la part de M. Decaisne[1]. L’ouvirandre de Bernier, d’apparence beaucoup moins singulière que l’ouvirandre fenestrée, a les feuilles pleines et les nervures peu distinctes ; c’est la condition que présente une troisième espèce du genre observée au Sénégal.

Dans la partie orientale de Madagascar, où il y a tant de rivières et de ruisseaux, tant de lacs et de marais, on peut le croire aisément, les plantes aquatiques abondent. Outre les joncs et différentes herbes d’un aspect assez ordinaire, beaucoup d’espèces sont vraiment remarquables. Elles sont trop nombreuses pour qu’on les cite toutes ici, mais il en est d’un type si curieux qu’il faut les signaler ; Aubert Du Petit-Thouars les a découvertes et lis a nommées les hydrostachis, Adrien de Jussieu les a étudiées[2]. Ces hydrostachis ont des touffes de feuilles plongeantes ; au centre des touffes s’élèvent des tiges portant des fleurs dioïques disposées en épis. Plantes d’apparence modeste, l’examen du savant est nécessaire pour en dévoiler les particularités et pour mesurer la distance qui existe entre elles et les formes les plus voisines observées sur d’autres terres, tandis que les ravissantes fleurs bleues ou un peu violettes du nénufar de la grande île africaine répandues à profusion sur les eaux tranquilles charment tous les yeux[3]. Les voyageurs allant d’ivondrou à Andouvourante, traversant ou contournant les lacs Risouamassaï, Rasouabé, Imoasa, se trouvent en présence d’une admirable nature. Au matin, il y a des scènes délicieuses : l’eau verdâtre, les rives herbues parsemées de belles fleurs, les petits villages épars, les fraîches prairies couvertes de rosée, les arbres se mirant

  1. Ouvirandra bernieriana, Decaisne, in Icones selectœ Plantarum, edit. a Benj. Delessert, t. III, p. 62, pl. 100.
  2. Quatre espèces sont décrites par A. de Jussieu, Icones selectœ Plantarum, éditæ a Benj. Delessert, t. III, p. 57-60, pi. 91-94.
  3. Nymphœa madagascariensis. De Candolle.