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et couvert d’une riche végétation. Au sommet, où l’on a planté le mât des signaux, la vigie découvre Nossi-Bé tout entière, ainsi que les îles voisines. La petite terre est arrosée par des ruisseaux et trois belles rivières ; la plus importante, le Djabala, après avoir traversé une plaine fertile et un marais rempli de palétuviers, se jette dans la mer à peu de distance d’Helville, la capitale de la colonie française. Sur toute la partie centrale de Nossi-Bé, les traces de l’action d’anciens volcans frappent les yeux ; vers la côte orientale, on suit une coulée basaltique fort épaisse, cachée sur une grande étendue par un dépôt de tuf et de matières sablonneuses. Loucoubé est une masse de granit revêtue d’une couche de terre végétale ; au pied et sur les flancs de la montagne, d’immenses blocs forment des cavernes profondes ; on en voit qui servent de lit à des ruisseaux limpides. Dans les ravins et les anfractuosités, une argile jaune ou rougeâtre s’est déposée ; on emploie maintenant cette matière à la fabrication de briques excellentes pour les constructions. Une zone de schiste bleuâtre plus ou moins bien stratifié entoure le massif, et dans plusieurs localités le schiste, se détachant par lames minces, paraît devoir fournir de très bonnes ardoises. Au nord de l’île, on observe une formation particulière, des couches de grès d’une épaisseur considérable superposées aux roches granitiques. Gemme des cendres ou d’autres débris volcaniques les recouvrent en certains endroits, on juge que le soulèvement de cette portion de l’île est d’une époque plus ancienne que celui du centre.

Une circonstance particulière a été l’origine de quelques études sur le sol de la Grande-Terre. L’envoyé de France au couronnement du roi Radama II, M. le capitaine de vaisseau Jules Dupré, avait reçu la mission de conclure un traité de commerce et d’amitié avec le nouveau roi. Par cet acte, signé à Tananarive le 12 septembre 1862, ratifié à Paris le 31 avril 1863, toute sécurité était garantie aux Français qui s’établiraient à Madagascar ; le droit de propriété était reconnu, la juridiction consulaire admise. Le même jour, en présence des principaux chefs malgaches et des missions de France et d’Angleterre, le souverain signait une charte accordée à M. Lambert dès l’année précédente ; Radama donnait à son ancien ami pouvoir exclusif de fonder une compagnie pour l’exploitation des mines de Madagascar et pour la mise en culture de toutes les parties inoccupées du pays, avec le droit d’ouvrir des routes, des canaux, et d’établir des chantiers de construction. Jaloux d’assurer le succès de l’entreprise, désirant faciliter les opérations de la compagnie, le roi expédia sans retard des ordres à différens chefs de la côte, afin d’éviter les difficultés au sujet de la prise de possession des terrains. L’empereur Napoléon III donna son adhésion au projet. Par un décret en date du 2 mai 1863,