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qui vient au monde. Les infanticides se multiplient pour les mêmes causes que chez les Antanosses ; sous le règne de Radama, les auteurs de ces crimes furent menacés de châtimens terribles, — le mal ne semble pas avoir disparu. Le mariage des personnes de qualité est consacré par une cérémonie, mais la séparation demeure toujours facile ; en aucun cas, le mari n’est empêché de posséder plusieurs femmes en sa maison. Le serment du sang, qui doit créer un lien de fraternité indissoluble entre deux individus, reporte au souvenir de la manière dont d’autres Malgaches concluent les traités d’amitié ; on verse le sang d’une poule, chacun en boit une petite quantité en vociférant des imprécations, en appelant sur sa tête mille malédictions, s’il manque à la foi jurée. Chez les Ovas, avec le riz, le bœuf, le chevreau, les volailles, — pintades et canards domestiques ou sauvages, — constituent les alimens les plus ordinaires ; on estime les œufs lorsque le poulet est développé, on recherche les œufs de crocodile, et, lorsque par malheur les sauterelles ou plutôt les criquets fondent sur les champs, on les récolte pour les manger, aussi bien que les vers à soie. En cas de maladie, quelques plantes, de l’eau de riz, les charmes ou les olis, comme sur la côte, sont les remèdes habituels. Les funérailles des hauts personnages ressemblent à celles dont nos anciens compatriotes étaient les témoins aux environs du fort Dauphin ; mais dans l’Ankova le séjour des morts diffère entièrement de celui qu’on voit au pays d’Anossi. Les tombes des familles riches exigent un travail énorme ; ce sont des chambres creusées dans le sol à une certaine profondeur et couvertes par une voûte formée de pierres de granit et de couches de terre alternativement superposées. Les ouvriers détachent les blocs de granit en les soumettant à un feu de bouse de vache, et en versant de l’eau froide sur la pierre brûlante au point où il convient d’opérer la fracture. Le bloc, soulevé à l’aide de leviers, enveloppé de paille pour résister aux chocs, attaché avec des cordes, est ensuite traîné jusqu’à sa destination ; on a vu parfois 500 ou 600 hommes employés au transport d’une seule pierre.

Quand les missionnaires anglais vinrent à Tananarive il y a un demi-siècle, les Ovas ne savaient pas cultiver la terre autrement que les peuples de la côte. Ils fondaient le fer par les procédés tout primitifs dont Flacourt et Sonnerat ont donné une description ; la première forge européenne introduite dans la province d’Imerina causa autant de surprise que d’admiration. A Madagascar, l’usage de la monnaie est de date récente ; ce sont les piastres d’Espagne qui ont d’abord été introduites. Les indigènes ont tout de suite inventé un moyen de division aussi simple que barbare : ils coupent les pièces par morceaux ; l’opération étant grossièrement exécutée,