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abondance, » de visiter enfin telle étendue de la côte que le commandant jugera n’avoir point été exactement déterminée. Des astronomes et au moins un naturaliste furent embarqués. Dans cette campagne, accomplie pendant les années 1822 à 1824, la configuration de l’île de Madagascar, jusqu’alors tracée d’une manière très imparfaite, a été l’objet d’études remarquables ; des observations importantes sur le pays ont été consignées[1]. Après avoir examiné le littoral de Tamatave et de Foulepointe, ainsi que les parages de l’île Sainte-Marie, l’expédition du capitaine Owen se dirigea vers la baie d’Antongil. Entre Tamatave et Tintingue, on le sait, la côte est basse, les montagnes se dressent à distance ; au nord, les rivages prennent un aspect plus abrupt, les collines viennent près de la mer, formant en certains endroits des promontoires rocheux d’une apparence surprenante ; les hauteurs couvertes d’une brillante végétation, les ruisseaux traversant les plaines verdoyantes, offrent un grand charme. Sur les bords marécageux de la rivière Maransetra[2] s’élèvent des arbres magnifiques, et les ketmies (hibiscus) étalent de ravissantes fleurs. Au milieu de ces paysages des tropiques, la scène se trouve animée avec une simplicité pastorale lorsque les bœufs piétinent le sol trempé qui doit recevoir le riz. Quand on est parvenu tout au nord de la grande île africaine, on rencontre la baie de Diego-Suarez, — un des plus beaux havres du monde, s’écrient les navigateurs. Le pays d’alentour est habité par des Sakalaves absolument misérables ; les villages se composent de huttes basses couvertes de feuilles de palmier, maintenues à la charpente par des courroies, avec des portes si étroites que les explorateurs anglais sont rappelés au souvenir des loges où l’on enferme les animaux qui fournissent au Yorkshire une partie de sa richesse. Dans cette région humide, les lits, faits de bambous, sont élevés à quelque hauteur au-dessus du sol. Les habitans ont peu de chose à offrir autre que des bœufs, t ce qu’en échange ils souhaitent au plus haut degré, ce sont des armes à feu. Sur le côté oriental de la baie, le plus exposé à la tempête, les arbres rabougris et enchevêtrés présentent une barrière impénétrable pour un homme. Sur le rivage des colonnes de madrépores, — plusieurs d’entre elles semblables à des aiguilles creuses et cylindriques, — des roches de formation volcanique, fournissent des abris à des milliers d’animaux marins ; les yeux des jeunes officiers qui opèrent des sondages ne cessent d’être ravis par ces mollusques tels que les harpes traînant des coquilles splendides.

  1. Narrative of voyages to explore the shores of Africa, Arabia and Madagascar, under the direction of captain W. F. W. Owen, 2 vol. ; London 1833.
  2. Ce nom est écrit. Maransectzy dans la relation du capitaine Owen.