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la question du Luxembourg ; enfin une commission mixte, dans laquelle des officiers-généraux ou supérieurs représentaient les différentes armes, avait examiné les types de nos bâtimens de transport pour arriver à une répartition intelligente des troupes et du matériel. Un travail complet avait été fait, réglant dans les plus petits détails l’embarquement d’un corps d’armée de 40,000 hommes, composé de trois divisions d’infanterie, d’une division de cavalerie avec les services annexes de la réserve et de l’intendance ; chaque navire de la flotte était classé à l’avance comme devant transporter tant d’hommes, tant de chevaux ou tant de tonneaux d’encombrement ; l’artillerie avait fourni les dimensions de ses caissons, le train celles de ses voitures, l’intendance avait dressé la liste exacte de son immense matériel de campement, d’habillement et d’ambulance ; enfin l’escadre pouvait porter quinze jours de vivres et de fourrages pour le corps d’armée entier.

Comme le pays, le gouvernement avait donc vu dans la marine, au cas d’une guerre avec l’Allemagne du nord, un auxiliaire puissant destiné à faciliter une diversion sur le littoral ennemi. Aussi dès le début des hostilités prit-on des mesures en prévision d’un grand embarquement de troupes à Cherbourg. Un marché passé avec les compagnies maritimes mit leur puissant matériel à la disposition de l’état, la flotte de transport reçut l’ordre de se réunir dans la Manche, le gouvernement désigna les officiers-généraux qui devaient en prendre le commandement, ainsi que ceux de l’armée de terre destinés à diriger les troupes dans cette campagne ; une division d’infanterie de marine, qui formait le noyau du corps de débarquement, fut concentrée sur le littoral. Ce furent là, hélas ! les seuls commencemens d’exécution donnés à ce grand projet. Wissembourg d’abord, puis Wœrth et Forbach vinrent anéantir toutes les espérances que pouvait concevoir le pays de la diversion attendue de la marine. La patrie était envahie, et, pour en défendre le sol, ce n’était même pas assez de toutes les forces militaires que la France pouvait mettre sur pied. La division d’infanterie de marine partit pour Châlons ; Toulon, Brest et Cherbourg envoyèrent à Paris leurs réserves de canonniers et de fusiliers, l’équipage entier du Louis XIV vint armer les forts de la capitale. Le débarquement était remis à des temps plus favorables, les transports désarmaient dans les arsenaux.

Au nombre des élémens qui composent la force maritime de la France, on a toujours compté, et avec raison, sa flotte de transport. Les services qu’elle a rendus lors de l’expédition du Mexique, lors de la guerre de Chine, ceux qu’elle rend journellement à l’Algérie, à nos colonies des Antilles, de Cochinchine et de la