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L’autonomie du corps de santé militaire est la première des réformes à obtenir ; aujourd’hui la médecine militaire n’est pas même directement représentée au ministère de la guerre, où elle ne. forme qu’une des sections de l’administration. Il existe, il est vrai, un conseil de santé des armées ; mais il n’a que voix consultative. Il est, dit l’article 17 du décret du 23 mars 1852, « chargé, sous l’autorité du ministre de la guerre, de surveiller et de diriger, en ce qui concerne l’art de guérir, toutes les branches du service de santé, et d’éclairer le ministre sur toutes les questions qui s’y rapportent. Il donne un avis consultatif sur la désignation des officiers de santé pour les divers emplois du service sanitaire… Il concourt dans la commission mixte (composée d’un général de division, de deux intendans et de trois médecins inspecteurs) au classement des propositions pour l’avancement au tour de choix. » Du reste, cette autonomie ne se rencontre à aucun degré de la hiérarchie, ni en temps de paix, ni en temps de guerre. Les hôpitaux militaires en temps de paix sont sous la haute surveillance, sous l’administration directe du sous-intendant militaire, duquel relèvent tous les officiers de santé attachés à sa circonscription. En temps de guerre, les ambulances, les hôpitaux, le service sur le champ de bataille, sont dirigés par l’intendance ; le médecin en chef de l’armée est lui-même soumis à l’autorité de l’intendant-général. C’est cet intendant ou ses représentans directs qui décident si tel ou tel édifice présente les conditions requises pour être converti en hôpital ; ce sont eux qui règlent le chiffre des malades que doit renfermer une salle, qui choisissent les villes où se feront les évacuations, et c’est tout au plus s’ils ne se croient pas autorisés à désigner quels sont les malades qu’on peut considérer comme transportables.

L’avantage d’une unité aussi complète que possible dans la direction est la seule raison qu’on oppose à l’émancipation de la chirurgie militaire ; mais tout le service de santé ne pourrait-il être unifié entre les mains du médecin en chef de l’armée ? Le corps de santé militaire a droit à l’autonomie aussi bien que le génie et l’artillerie, aussi bien que l’intendance elle-même, parce que, comme eux, il a une spécialité de fonctions, de besoins, de connaissances techniques. On objectera qu’il faut au corps de santé des moyens de transport, du matériel, et que les médecins devront toujours pour cette raison recourir à l’intendance militaire. L’objection n’a qu’une valeur apparente. De ce que la médecine militaire a besoin de matériel, il ne s’ensuit pas nécessairement qu’on doive confier la direction du service de santé à ceux qui ont la charge d’entretenir ce matériel, et non à ceux qui peuvent seuls en régler utilement l’emploi pour le salut des malades et des blessés. Si l’objection peut se produire, c’est parce qu’il y a confusion dans toutes les branches