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pouvante, — et je me dis : Les hommes dans ce monde — sont pires que les bêtes!

« Au lieu de se tuer entre eux et de se haïr, — de se faire du mal et de se nuire, — pourquoi ne pas s’entr’aimer? — N’est-ce pas pour cela qu’ils ont été créés?

« Ah! malédiction sur la guerre! — et sur tous ceux qui cherchent, nuit et jour, — à jouer le rôle de la mort, — comme si elle était trop paresseuse!

« Et nous trop jeunes ou trop vieux, — qui restons à la maison, demandons la bénédiction — de Dieu sur nos frères, pour que dans leur pays — ils reviennent, sans tarder, avec la victoire[1]! »


La guerre terminée, — sans la victoire, — les complaintes abondèrent. Aucune ne nous semble mériter les honneurs de la traduction. Cette sorte de littérature ne brille pas plus en breton qu’en français par la délicatesse du sentiment ou par la beauté du style, et elle n’a d’intérêt que pour les personnes qui veulent étudier dans toute sa naïveté la forme la plus humble de la poésie populaire. Je ne veux ici qu’en signaler l’existence. Une de ces pièces a pour sujet « l’explication des misères de Paris pendant le siège. » Le triste drame de la commune vint fournir une nouvelle matière aux faiseurs de ballades, et « l’histoire véritable de la vie et des vaillantises du grand comte Mac-Mahon, duc de Magenta et maréchal de France, » fut mise en complainte. Ce n’est pas du reste dans ces feuilles volantes, vendues dans les campagnes par les colporteurs, qu’il faut chercher les œuvres des vrais poètes de la Bretagne. Ceux-là publient leurs œuvres comme variétés en langue nationale dans les journaux et les recueils du pays; c’est là que nous avons choisi la plupart de nos citations, c’est là que nous prendrons une dernière pièce dont le sage apologue nous semble utile à entendre, même hors de Bretagne. L’auteur, M. Luzel, a imité un passage des Pèlerins polonais de Miçkiewicz, mais il a imité en maître qui transforme son modèle.


LA MÈRE MALADE.

« Écoutez! Une mère était restée dangereusement malade — sur son lit; son fils courut à la ville — le plus vite qu’il put, afin de chercher des médecins — pour lui donner des remèdes et guérir son mal.

« Il n’était pas riche, mais il ne craignait pas — de donner tout son argent pour sa mère chérie, — Il amena trois médecins, les plus renommés — et les plus savans, d’après ce qu’on lui avait dit.

  1. Le texte de cette poésie a été donné par le Publicateur du Finistère du commencement de décembre.