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revenu foncier que la manière dont est établi chez nous le droit sur les successions, et il y a là aussi une réforme à opérer. La circonstance que les héritiers sont mis en possession soudaine d’une augmentation de fortune acquise gratuitement et quelquefois d’une façon inespérée a été évidemment exploitée par le législateur, et il n’y a pas lieu de lui en faire un reproche, tant qu’il se renferme dans des limites modérées. Si élevés qu’aient été rendus ces droits, ce n’est pas dans les circonstances actuelles qu’on peut réclamer contre cet impôt, lequel frappe d’une manière assez dure sur les transmissions de biens meubles ou immeubles. Quelques personnes voudraient rendre progressif l’impôt qui atteint les successions en ligne collatérale; nous ne les suivrons pas dans cette voie : l’idée de l’impôt progressif est fausse et dangereuse sous toutes les formes et à tous les degrés. En revanche, nous insisterions très énergiquement sur ce qu’il y a d’exorbitant à ce que le fisc opère ses perceptions d’après la valeur des biens, sans tenir compte des dettes; c’est un véritable abus, — la déduction des dettes est ou devrait être de principe. N’est-il pas temps de faire disparaître, comme l’ont fait la plupart des nations, cette disposition inique de notre système fiscal? N’y aurait-il pas lieu aussi, au moins pour certains cas, de prolonger le délai de six mois accordé par l’administration de l’enregistrement, de façon, comme on l’a dit justement, que les nouveaux propriétaires puissent se libérer au moyen des revenus des biens dont ils héritent, sans être obligés de contracter des emprunts ou de faire des ventes préjudiciables? Mais, quelque importante que puisse être cette tolérance quand le droit paraît devoir entamer le capital, il n’y a là rien de comparable aux exigences de l’équité en ce qui touche la première réforme, que nous regardons comme urgente. Les futures chambres françaises, si ce n’est l’assemblée actuelle, devront tenir à honneur de l’accomplir.


II.

C’est maintenant de l’impôt sur les revenus mobiliers, pris comme base unique de ce genre de taxes, c’est de l’impôt seul sur les revenus mobiliers que nous avons à nous occuper en serrant de plus près le rapport de la commission. Bien que nous considérions nous-même comme un acte de résignation patriotique l’acceptation d’un impôt ainsi mutilé, et qui présente encore d’autres imperfections sur lesquelles il y a beaucoup à redire, nous n’hésitons pas à soutenir qu’il subsiste sur l’application de cette forme d’impôts des préventions que l’on doit combattre : les unes partent de craintes