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le coup de cette véhémente contradiction, sous la férule d’un tel contradicteur, les partisans de l’autonomie communale voudront-ils se tenir pour battus?

Il reste à examiner comment ce système, si sévèrement désavoué par M. Mazzini, a pu être imaginé en France, proclamé à Paris, et obtenir à première vue un nombre considérable d’adhérens. — Le gouvernement républicain de 1848, effrayé par les souvenirs de l’ancienne commune de Paris, crut devoir suspendre le régime électif pour le choix des conseillers municipaux de la grande capitale. Loin de rétablir les élections, l’empire décida qu’une ville telle que Paris ne devait point remettre au suffrage local le soin d’une administration qui intéresse le pays tout entier, et qui se rattache par tant de liens politiques et financiers à l’ensemble du gouvernement. On sait les argumens qui ont été invoqués pour ou contre ce système; on sait également que dès les premières années de l’empire le droit d’élire les membres de l’administration municipale fut revendiqué avec les plus vives instances par le parti libéral et devint un thème constant d’opposition. Enfin, soit par principe, soit par dépit de se voir ravir une attribution qui appartenait à toutes les autres communes, Lyon excepté, soit par un sentiment de réaction contre certaines mesures reprochées au régime autoritaire, la majorité de la population parisienne en était venue à placer en tête de ses vœux politiques la restitution des droits électoraux pour la composition de son conseil municipal. Il était donc naturel qu’au lendemain d’une révolution qui ramenait la république, la pensée de reconstituer le municipe parisien fut accueillie avec empressement, et que ce simple mot : commune, fût accepté comme un mot d’ordre, sans être autrement expliqué. Il y eut de la part des meneurs révolutionnaires du 18 mars une grande habileté à l’inscrire sur leur drapeau et à se présenter aux yeux de la population comme les défenseurs d’un droit que les partis de l’opposition sous l’empire avaient réclamé avec tant d’énergie pendant vingt ans. En outre, comme les révolutionnaires parisiens ne sont pas égoïstes et qu’ils ont toujours voulu communiquer à la province et même à l’étranger le bénéfice de leurs opérations, ils adressèrent généreusement le plan de leur commune libre aux principales villes des départemens, où ils comptaient trouver des adhésions et recruter des auxiliaires.

Comment s’étonner que la démocratie des villes ait manifesté des sympathies pour la commune de Paris? Depuis longtemps l’extension des libertés locales figurait dans tous les programmes politiques. On disait que la vie se retirait de la province, que le sang n’y circulait plus, que les extrémités étaient froides. Les uns, remontant aux traditions du passé, demandaient le retour aux insti-