Pour la chambre des députés, je n’aurais guère qu’une réforme à proposer, mais je la considère comme très importante : il faudrait réduire à 300 environ le nombre de ses membres. La constitution des États-Unis offre encore en ce point un exemple qui mérite d’être étudié. Le but constant du législateur a été de limiter le nombre des représentans en des bornes très étroites. Ce nombre ne s’est pas accu en proportion de la population, et il a même été réduit. En 1789, la chambre comptait 65 membres pour 4 millions d’habitans. En 1862, il a été fixé à 244 pour plus de 30 millions d’habitans ; en 1833, on l’avait réduit de 240 à 223. A chaque nouveau cens, les anciens états voient diminuer le nombre de leurs représentans, parce que l’augmentation de la population y a été moins rapide que dans les états nouveaux. Ainsi New-York est tombé de 40 à 31, le Massachusetts de 20 à 10, la Virginie de 23 à 11. Tous les états ont accepté cette mesure qui semblait diminuer leur importance, parce qu’ils en reconnaissaient la nécessité. C’est une grande preuve de sagesse politique. Les dispositions de la loi américaine sont fondées sur une appréciation très juste des conditions dans lesquelles une assemblée délibérante peut le mieux remplir sa mission. C’est grâce à cette excellente précaution que nous voyons aux États-Unis une chambre, souvent troublée par les scènes les plus grossières, adopter d’ordinaire des mesures très sages, et les débats les plus orageux aboutir à des transactions qui révèlent un grand esprit de modération.
Dans une réunion très nombreuse, un homme éminent, s’il a la voix faible et des idées différentes de celles de la majorité, parviendra difficilement à se faire écouter. Il suffit de ces sourds murmures que le président le plus sévère ne peut réprimer pour l’empêcher d’être entendu, tandis qu’un orateur doué d’un organe sonore se fera entendre malgré tout, quand même il n’aurait à débiter que des lieux-communs, et ainsi la puissance des poumons l’emportera sur la force de l’esprit. Une assemblée nombreuse a les entraînemens de la foule. La foule est soumise à des impressions communicatives, soudaines, électriques. Ce qui agit sur elle, c’est le langage des passions, tantôt celui des passions élevées et généreuses, tantôt celui des passions désordonnées ou aveugles, mais toujours celui des passions. La foule a horreur des tempéramens, elle se porte du premier coup aux extrêmes, parce que chaque impulsion se fortifie et s’accélère en raison de la masse de ceux qui la partagent. Réunissez dans une même salle sept ou huit cents individus très sensés, il est à craindre qu’ils ne fassent plus d’une sottise.
En tout pays, quelque riche qu’il soit en hommes capables de diriger les affaires publiques, il est déjà très difficile de trouver