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terre, et construisit une muraille le long du Bosphore pour mettre le port à l’abri contre les incursions des pirates vandales, qui commençaient à courir les mers de la Grèce. Ces divers travaux furent appréciés de la ville comme un grand bienfait, et un jour que Cyrus assistait aux jeux du cirque l’empereur étant présent, le peuple cria : « Constantin a fondé Constantinople, Cyrus l’a renouvelée, et ce n’est pas tout ce qu’il saura faire. » Ce cri blessa l’orgueil de l’empereur, et le ministre fut perdu ; sa protectrice Eudocie venait de tomber en disgrâce, il tomba avec elle. À l’instigation des eunuques, redevenus tyrans. Théodose le dépouilla de sa préfecture et de tous ses honneurs ; il le força même comme par grâce à s’exiler dans un évêché de la Phrygie, où ses ennemis le poursuivirent encore, répandant le bruit qu’il était païen, parce que dans ses vers il avait employé les formules mythologiques, qui constituaient alors le langage de la poésie. Dégoûté de la méchanceté des hommes, Cyrus quitta son évêché pour aller s’ensevelir dans la retraite, et disparut du monde ; mais son souvenir est resté honoré dans l’histoire.

Si l’heureuse influence d’Eudocie dota l’empire d’un bon ministre, la crainte de Pulchérie et le désir de l’éloigner des affaires en amenèrent un bien détestable. Théodose, en guerre alors avec sa sœur, crut que rien ne déplairait plus à celle-ci que le retour de l’eunuque Antiochus au palais, de ce pédagogue persan donné par lezdjerd à Théodose enfant, et que Pulchérie avait eu hâte de renvoyer en prenant l’empire. Cette expulsion, devenue un mérite aux yeux de Théodose, lui fit rappeler Antiochus, avec qui il n’avait pas cessé d’entretenir des relations. Ce calcul d’ingratitude réussit mal au prince qui s’en rendait coupable. Tandis que Pulchérie, justement blessée, s’abstenait de conseils et d’observations vis-à-vis de son frère, celui-ci n’avait guère à se louer de son ministre. Antiochus, croyant s’être construit un empire absolu sur l’inimitié du frère et de la sœur, perdit toute mesure dans son administration tyrannique, toute réserve même et tout respect à l’égard du prince, qui fut enfin obligé de s’en défaire. Après l’avoir dépouillé de sa charge et de ses titres, après avoir rendu au fisc les biens qu’il avait volés. Théodose le fit pape, suivant l’expression d’un historien grec, c’est-à-dire qu’il le réduisit à la nécessité de demander par miséricorde qu’on l’ordonnât prêtre, puis il l’envoya finir ses jours dans une église de Chalcédoine. Ce ne fut pas tout : une loi rendue à son sujet exclut à jamais les eunuques de la dignité de patrice ; ce fut la seule trace du passage d’Antiochus dans le gouvernement de l’empire d’Orient.

Un autre Antiochus, préfet du prétoire et consul, fit plus d’honneur au caractère de Théodose, et fournit à ce règne sa seule page glorieuse : il publia en 438 le code théodosien, dont la rédaction