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état exige-t-il des qualités particulières, et il faut en outre n’avoir pas d’enfans ou se résoudre à les abandonner.

Si l’on cherche à se rendre compte du prix des subsistances, l’enquête du foreign office fournit tous les élémens d’information possibles, et même des tableaux de statistique détaillés. Les principales denrées alimentaires ne sont pas plus chères aux États-Unis qu’en Angleterre. Le pain et les légumes y sont presque aux mêmes prix, la viande de boucherie est quelquefois meilleur marché en Amérique, tous les autres articles s’y vendent à des taux exorbitans; les œufs, le beurre, la bière, le charbon, sont de 40 à 60 pour 100 plus chers que dans la Grande-Bretagne; pour les objets d’habillement, ils coûtent aux États-Unis deux fois et même souvent trois fois plus qu’en Europe. C’est le logement surtout qui prélève une grande partie du salaire de l’ouvrier. Les rapports des consuls anglais sont remplis de descriptions séduisantes des cottages qu’habitent les artisans aisés; la plupart des grandes villes des États-Unis ont une énorme étendue, et les maisons, presque toutes petites et à deux ou trois étages au plus, y sont disséminées sur un immense espace. Avec une population de 120,000 âmes, Buffalo occupe presque une surface de 40 milles carrés, ce qui ne fait guère que 3,000 habitans par mille carré. La Nouvelle-Orléans, qui a 250,000 habitans, occupe 36 milles carrés, ayant une façade de 12 milles sur le Mississipi. Philadelphie et la plupart des villes américaines, grandes ou petites, se composent aussi d’habitations dispersées sur une vaste étendue de pays. Cette configuration des villes est très favorable à la construction de petites maisons, qui peuvent être tout entières achetées ou louées par les artisans. Le terrain n’acquiert presque jamais un prix aussi élevé que dans nos centres européens. Aussi les ouvriers habiles ont le plus souvent un cottage qu’ils occupent seuls avec leur famille. Cette habitation contient une cuisine, une salle, deux ou trois chambres et quelquefois un petit jardin; mais, que l’on ne s’y méprenne pas, le prix de ces loyers est excessif. A Buffalo, ces maisons se louent de 10 à 12 dollars par mois, soit de 600 à 720 fr. par an; à Galveston, deux chambres et une cuisine coûtent 20 dollars par mois, soit 1,200 fr. par an; une cuisine et quatre chambres reviennent à près du double. Dans l’état du Maine, les loyers sont moins hauts et oscillent entre 350 et 750 francs par an, se rapprochant bien plus souvent de ce dernier chiffre que du premier. A Philadelphie, les logemens les plus simples reviennent annuellement à 750 francs, ceux des artisans aisés montent à 1,000 francs et quelquefois plus; le manœuvre, qui ne loue qu’une chambre, ne peut payer moins de 500 francs par année. Il est vrai que l’ouvrier qui a des épargnes peut acquérir un cottage, ce qui est pour lui avan-