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ou anthérozoïde est doué de mouvement. Il consiste en un long filament enroulé sur lui-même en spirale, couvert de cils vibratiles et transportant à l’aide de leurs mouvemens une petite vésicule, entourée de ses replis, qui constitue le corps fécondateur. De là résulte une progression dont la cause, peut-être due à des agens purement physiques, échappe encore à l’analyse, mais qui rappelle ce que montre le spermatozoïde. Voilà donc trois états bien distincts que revêt nécessairement la jeune fougère avant de devenir semblable à son auteur : d’abord séminule, puis prothallium, ensuite anthérozoïde ; c’est seulement l’union de ce dernier avec l’archégone qui clôt cette série de transformations, dont l’analogie avec ce que produit chez les animaux le phénomène de la génération alternante est certainement des plus remarquables. La motilité plus ou moins intentionnelle est l’apanage de l’un de ces états, lequel correspond peut-être (il est hardi, mais non absurde de le soupçonner) à une phase primitive que le monde des plantes aurait traversée avant de devenir ce qu’il est. De toutes façons, il est exact d’avancer que les végétaux chez qui on remarque des mouvemens de translation présentent passagèrement par cela même les caractères de l’animalité avant de posséder définitivement ceux de leur propre règne.

Tout converge, on peut le dire, vers l’animalité inférieure, et, si l’on consent à faire abstraction des organismes supérieurs, qui par le fait ne sont venus dans ce monde qu’après les autres, on se trouve en présence d’une collection d’êtres qui se ressemblent au moins une fois dans le cours de leur existence, laquelle se partage en plusieurs périodes. Or c’est à l’état de germe, d’embryon ou d’organe reproducteur, c’est-à-dire au point de départ de chaque individu, que la similitude est la plus frappante ; au contraire c’est à l’aide des états subséquens que l’écart se prononce entre eux et va s’accentuant jusqu’à l’état adulte. Il est possible de conclure de ces prémisses que tous ces êtres diffèrent bien plus par les transformations de tout genre qu’ils subissent que par le fond réel des choses. Si l’on tient compte uniquement de l’état originaire en éliminant tous les autres, surtout si l’on considère l’individu comme offrant un tableau résumé des vicissitudes de la race dont il sort, rien ne s’oppose à ce que ces êtres nous apparaissent comme s’ils avaient été modelés primitivement d’après un type, non pas identique, mais sensiblement uniforme.

Au fond des productions de la vie, on retrouve donc les élémens d’une puissante unité qui lui sert de substratum et de base. Elle est comme un terrain solide, maintenant caché, sur lequel de nouvelles constructions se sont incessamment élevées, multipliant les ailes et les étages. La diversité s’est si bien entée sur cette unité primitive,