reçues en combattant l’étranger ne sont pas les seules par lesquelles notre bien-aimée patrie a vu couler le plus pur de son sang. Elle a des plaies plus profondes, plus anciennes et plus dangereuses. A qui devons-nous cette horrible guerre civile, cette anarchie désespérante dans les esprits, ce déchaînement des passions les plus subversives et cet affaissement des âmes? Non! les causes matérielles ne suffisent pas pour expliquer l’accumulation de tant de maux et de maux si divers; il faut aller plus loin, plus au fond, il faut arriver aux causes morales et signaler avec fermeté ce qu’on peut appeler la cause des causes. Quand un peuple sort des mains de son gouvernement moins généreux, dévoré d’appétits plus grossiers, moins dévoué au drapeau national, moins attaché à cette unité française dont il ne semble presque plus comprendre les conditions; quand il accepte avec plus d’indifférence curieuse que de salutaire indignation les déclamations contre toutes les bases de la société, on peut tenir pour certain que ce peuple n’est plus dans la voie naturelle de l’humanité, qu’il en a dévié sous des influences continues et insensibles, et qu’il n’est pas enfin le plus grand coupable.
Le grand coupable, la philosophie de l’histoire le signalera impitoyablement : c’est ce gouvernement qui, au lieu de s’adresser aux mâles vertus du peuple et de lui eu donner l’exemple, aura exploité dans son intérêt ses plus mauvais penchans. L’enquête à laquelle l’assemblée nationale se livre aujourd’hui montrera comment l’empire a profondément altéré toutes les institutions destinées à diriger, à élever, à défendre la société; aucune n’a échappé à son action délétère, car il a touché à toutes. D’ailleurs rien n’avait manqué dans la phase dictatoriale qui a suivi le coup d’état du 2 décembre 1851 pour faire saisir aux moins aveugles ce que le nouveau régime réservait à la France. Le prince-président ne s’est servi du pouvoir dont il s’était violemment emparé que pour porter la main sur les droits les plus sacrés du citoyen en même temps que sur la propriété, en confisquant les biens privés de la famille d’Orléans. Comment s’étonner que de tels germes déposés et nourris dans le cerveau étroit et le cœur perverti d’une démagogie sauvage s’y soient développés, y aient grandi et aient produit, à vingt ans de distance, un autre assaut livré à l’assemblée nationale, d’autres attentats contre les personnes, et le retour par en bas de la confiscation, dont l’exemple était parti de si haut?
D’autres ont éloquemment raconté la violation de l’assemblée nationale, l’emprisonnement et l’exil des plus courageux citoyens. Qu’on nous permette de nous attacher à l’un de ces attentats, le moins familier à la génération nouvelle et peut-être un des plus