les supériorités par rapport à l’impôt sur le revenu, avoueront que ce système de pénalités n’était pas moins affreux que ce qu’on avait établi pour l’impôt du revenu nommé estimo qui avait précédé d’un siècle et demi l’impôt sur le capital. Avec l’estimo, l’inscription du retardataire sur le registre comprenant la liste des débiteurs de l’état entraînait la privation des droits politiques et de divers droits civils, la vente et au besoin la dévastation officielle des propriétés, la solidarité des fermiers, acquéreurs, parens, etc.
De grands peuples libres ont adopté partiellement ou dans de petits états les impôts sur le revenu et le capital. On ne trouve rien là qui se ressente d’un système préconçu sur l’impôt, ni d’une théorie radicale en politique. Les Américains, les Anglais, les Hollandais, les Allemands eux-mêmes au moins en ces matières, ne font pas de scolastique. Ils n’ont pas la prétention d’appliquer les mathématiques et la logique pure aux choses humaines. Il n’y a pas chez eux un parti toujours prêt à tirer les conséquences extrêmes de prémisses qui, poussées un peu loin, deviendraient menaçantes pour ceux, qui possèdent. L’établissement de catégories, l’emploi même, d’ailleurs très modéré, de la progression, n’y présentent pas de dangers immédiatement appréciables. Une autre remarque achève d’établir la différence des situations. L’esprit de localité, si puissant aux États-Unis, et encore aujourd’hui en Allemagne, maintient ces taxes dans une sphère indépendante d’un pouvoir absolu ou d’une dictature de hasard. La grande variété des formes qu’elles y revêtent selon la diversité des populations et des circonstances contribue à les défendre contre une uniformité tyrannique. C’est le mal dont nous sommes en France constamment menacés. Je ne veux pas jeter l’alarme ; mais je suis convaincu que tout faux principe introduit en cette matière aurait bientôt causé de véritables ravages. Où s’arrêteraient-ils ? Ne peut-on réformer à propos, ici comme ailleurs, en s’inspirant de principes d’un mérite éprouvé au lieu de recourir à des principes peu sûrs qui sont le contre-pied des maximes sur lesquelles repose tout notre droit moderne ? J’ajouterai enfin une observation qui s’applique spécialement à l’impôt. En faire un instrument de la guerre des classes serait absurde. Les classes se croient divisées en France, et elles ne le sont que par les sentimens qu’on développe dans la population ouvrière. Je ne sache au fond aucun pays où elles se rapprochent autant, où les fortunes soient plus égales et les intérêts plus confondus. Ce ne sont pas les riches qui feraient seulement les frais de ces tentatives systématiques, ce sont les masses.