Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 96.djvu/276

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était environné mettait entre ses agresseurs et lui une barrière que Cyrille ne franchit que plus tard, se bornant pour le présent à une attaque indirecte dont l’occasion s’offrit à propos. Un certain prêtre de Cilicie déposé par son évêque, et qui avait demandé son rétablissement dans le sacerdoce, prétendait ne l’avoir obtenu de l’évêque qu’à la condition de souscrire certain symbole de foi dont il produisait une copie. Il s’y était refusé, disait-il, attendu que ledit symbole lui avait paru suspect, et, l’évéque l’ayant en conséquence renvoyé non réconcilié, il s’adressait au saint concile pour obtenir justice et merci. Le déposé méritait bien son sort, à ce qu’il paraît, car l’assemblée le laissa comme il était ; mais elle examina le symbole, qui fut reconnu appartenir à Théodore de Mopsueste, au moins en ce qui concernait le mystère de l’incarnation, le reste étant une reproduction de celui de Nicée. Or plus d’un évêque dans l’extrême Orient avait adopté cette addition sur le Verbe fait chair. Examiné par des yeux peu bienveillans, critiqué, dépecé, le symbole tel qu’il était fut déclaré hérétique et condamné ; mais le nom de Théodore ne fut point mentionné dans la condamnation. Le concile à ce sujet rendit un canon resté fameux, par lequel il interdisait de composer, faire signer, répandre aucun symbole de foi autre que celui de Nicée, et de rien ajouter ni retrancher à ce dernier sous peine de déposition pour les ecclésiastiques et d’anathème pour les laïques.

La condamnation du symbole de Théodore était un coup dirigé en partie contre les Orientaux, qui professaient un véritable culte pour ce docteur de leur église ; mais une attaque plus directe partie des mêmes mains vint atteindre leur patriarche dans ses prérogatives. L’archevêque d’Antioche avait exercé de tout temps un droit de suprématie sur l’île de Chypre, dépendance du diocèse d’Orient. La métropole de l’île, Salamine, ayant perdu son pasteur, il arriva que les autres évêques le remplacèrent sans en référer au patriarche, ni soumettre à son approbation le choix qu’ils avaient fait. Celui-ci cassa la nomination, nomma lui-même un titulaire et l’envoya gouverner Salamine ; mais les évêques cypriotes ne le reçurent pas. Révoltés contre leur supérieur, ils députèrent au concile pour plaider leur droit, qu’ils appuyaient sur certains précédens, trois d’entre eux, parmi lesquels figurait l’intrus de Salamine. Le concile les accueillit avec d’autant plus de faveur qu’ils vinrent de prime abord se ranger au plus épais du bataillon cyrillien. Leur cause fut gagnée, et le patriarcat d’Orient perdit là une des brillantes perles de sa couronne.

La session finissait lorsque, le 2 ou 3 d’août, on vit aborder au port d’Éphèse le commissaire extraordinaire envoyé de Constantinople avec les pleins pouvoirs de l’empereur. Plus intelligent que Candidien, mais non moins strict observateur de la règle, aussi