Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 96.djvu/241

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dissolution de l’empire. La situation même de la Hongrie semblerait ne devenir légale qu’à dater de l’arrangement avec la Bohême. Le Reichsrath de Vienne ne serait plus qu’une réunion de délégués des diètes avec des pouvoirs très restreints, la chambre des seigneurs ne serait qu’un sénat consultatif. Bref, la constitution de 1867 disparaîtrait, l’empire se disloquerait, il ne resterait plus que les états-unis de l’Autriche. M. de Beust, qui jusque-là s’était tenu dans une grande réserve, s’est hâté d’intervenir auprès de l’empereur, et il a été appuyé non-seulement par les autres ministres de l’empire, le comte Lonyay, le général Kuhn, mais encore par le président du conseil de Hongrie, le comte Andrassy. L’empereur s’est arrêté alors, et le comte Hohenwarth a donné sa démission. Qu’en résultera-t-il maintenant ? Il est vraisemblable que le nouveau ministère appelé reprendra encore la politique de transaction, mais avec des concessions moins étendues ; seulement les Tchèques rentreront alors sous leur tente, de sorte que l’Autriche se trouve toujours dans cette alternative : si elle veut satisfaire la Bohême, les Allemands menacent de quitter le Reichsrath ; si elle modère ses concessions, ce sont les Tchèques qui plus que jamais se renferment dans l’abstention, et de tous les côtés on poursuit un dénoûment aussi impossible que nécessaire, on s’attache à une ombre de transaction qui s’évanouit toujours au moment où l’on croit la saisir. La politique autrichienne en est là, et M. de Bismarck à coup sûr la contemple sans déplaisir.

CH. DE MAZADE.



ESSAIS ET NOTICES.

L’INCENDIE DE CHICAGO.

Les télégrammes d’Amérique nous apportaient le 10 octobre une désolante nouvelle : la ville de Chicago était en flammes depuis la veille, et un ouragan ne permettait pas de maîtriser le feu. Le troisième jour seulement, le vent avait cessé, la pluie, qui tombait à torrents, avait éteint l’incendie, contre lequel n’avait pas du reste faibli un seul instant l’énergique ardeur des citoyens. Néanmoins l’étendue des ruines était sans exemple ; un tiers de la ville, tout le quartier des affaires, était perdu, 12,000 maisons n’existaient plus, et 100,000 personnes se trouvaient sans abri ; plusieurs centaines d’habitans avaient péri. Un jour auparavant, tout un quartier de la ville de Chicago avait déjà brûlé, et un journal du pays, le Chicago-Tribune, dans un numéro qu’on n’a pas pu distribuer, signalait cet incendie comme le plus terrible dont la ville ait jamais été témoin. Les hommes étaient accourus aux pompes, on s’était assez aisément rendu maître du feu ; une partie même de la po-