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rayon de la place qu’avait demandées le conseil de guerre, qu’imposait la situation. » Personne ne contestera, je le pense, la netteté de ces paroles.

M. le général Coffinières affirme qu’il a souvent entretenu le maréchal Bazaine « des mauvais résultats de l’inaction de l’armée pendant le mois de septembre. » C’est une charge de plus contre le commandant en chef. Je me garderai bien d’y contredire ; je laisse sans regrets à M. le général Coffinières le soin de confirmer et d’aggraver par son témoignage les reproches que j’ai adressés au maréchal Bazaine. On ne s’étonnera pas du silence que j’ai gardé à cet égard. Ne voulant rien avancer qui ne fût certain, je ne possédais aucun moyen de savoir ce qui s’était passé dans des entretiens confidentiels entre le commandant en chef de l’armée du Rhin et le commandant supérieur de la place. Le sujet de ces conversations est demeuré si secret que je n’en découvre aucune trace ni dans les souvenirs de mes compatriotes, ni dans les notes qui m’ont été confiées par plusieurs officiers, ni dans les nombreuses publications relatives au blocus. Tout le monde a remarqué à Metz la soumission absolue du général Coffinières aux ordres de son chef et l’apparente conformité de leurs vues jusqu’au 10 octobre. On n’y a guère soupçonné qu’il pouvait s’élever entre eux l’ombre d’un désaccord. Tous deux paraissaient s’entendre à merveille pour que l’armée restât sous Metz. Il semble même que M. le général Coffinières l’ait désiré plus encore que le maréchal Bazaine, s’il est vrai que le 5 ou le 6 octobre il ait écrit à celui-ci pour le supplier de ne pas quitter la ville, comme l’assure un officier supérieur de l’armée dont j’ai sous les yeux le récent et excellent ouvrage intitulé Metz, campagne et négociations. « La conduite du général Coffinières est d’autant plus regrettable, écrit cet officier, page 274, que son influence, déjà si funeste dans d’autres circonstances, contribua à modifier les intentions du maréchal et à le détourner de la seule voie qui eût encore pu sauver l’armée. Les résolutions énergiques qu’il proposera plus tard, l’opposition qu’il fera aux tentatives de négociations, les difficultés qu’il élèvera pour le partage des vivres, ne seront plus que des démonstrations intempestives et inutiles. » En lisant ces paroles, mon honorable contradicteur ne s’étonnera plus que je n’aie point parlé de la proposition qu’il fit le 15 octobre de « marcher au combat. » Je ne pouvais lui faire un mérite de proposer le 15, quand il n’était plus temps d’agir, ce qu’il avait essayé d’empêcher dix jours plus tôt, quand une action vigoureuse était encore possible.

Pour déterminer le rôle de chacun dans ces tristes jours, l’important n’est pas de savoir si le commandant supérieur de la place, se plaignant de l’inaction de l’armée, a conseillé « de petites opérations » au mois de septembre ou des opérations gigantesques au milieu d’octobre, c’est